Réaliser une interview est un excercice difficile pour de multiples raisons. Mais le plus important dans tout ça, c'est la motivation de la personne qui répond aux questions. Et s'il y a bien un qualificatif qui résume bien Asenka, l'un des organisateurs de la World Game Cup, le tournoi de jeux de combat made in France, c'est celui là. Asenka est un jeune homme qui en veut. Il est là pour une simple raison, faire connaitre le Versus Fighting. Un amour qu'il porte à cette discipline depuis plus d'une dizaine d'années maintenant. Et c'est à lui (et à d'autres irréductibles) que l'on doit la World Game Cup 2011, dont Gameblog est partenaire officiel cette année. Je vous propose donc de découvrir ce garçon et sa flamme, dans un petit entretien, entre quatre rounds yeux !
Interview
Bonjour. Pour commencer, pourrais-tu nous expliquer qui tu es et quel est ton rapport avec la communauté du Versus Fighting ?
Bonjour, mon pseudo est Asenka et je suis organisateur/journaliste/joueur dans le milieu du versus fighting depuis 11 ans... J'ai commencé début 2000 par créer l'association CTPL (www.console-league.com), avec laquelle nous avons organisé pas mal de tournois jusqu'en 2005. J'ai également crée les magazines Arkadia et Game Fan, qui étaient dédiés principalement aux jeux d'import, d'arcade et de fight. Pour finir, je suis un des organisateurs de la World Game Cup 2011 (site officiel de la WGC 2011), qui se tiendra fin février (25-26-27 février 2011), au Palais des Festivals de Cannes.
La World Game Cup 2010 par Hitcombo.com.
Qu'est-ce qui définit, selon toi, ce mouvement du Versus Fighting ?
Des joueurs qui ont tous attrapé le même virus : celui des jeux de combat. Ce n'est pas qu'une passion pour le jeu vidéo, ça se rapprocherait plus d'un sport martial numérique. Mais au delà de toute psychologie et métaphore de comptoir, je dirai qu'il s'agit simplement d'une bande de potes qui aiment délirer avec un certain type de jeux...
Petite vidéo d'ambiance réalisée lors de la WGC 2004.
Quels sont, à ton avis, les jeux les plus intéressants dans le domaine et pourquoi ?
Tout dépend des goûts et des couleurs, mais on peut classer les jeux par "catégorie", même si on peut rencontrer des joueurs qui aiment tout :
- Les fans des jeux techniques et pyrotechniques : Guilty Gear XX Accent Core en est l'étalon, avec BlazBlue CS.
- Les fans de l'arcade pure et dure, avec The King Of Fighters 2002 UM, et bientôt KOF'XIII.
- Et puis, il y a forcément Super Street Fighter IV, qui fait la fusion d'un peu tous les joueurs dans le sens où tout le monde peut y jouer facilement... A bas et niveau intermédiaire, c'est un peu le starter kit du jeu de combat. C'est un excellent titre à haut niveau cependant, même si je lui préférerais Street Fighter III Third Strike...
- D'un point de vue personnel, je reste un très grand fan de la série SoulCalibur, très jouée en compétition en France, mais trop sous-estimée par les médias.
Finale de SoulCalibur IV lors du World Game Cup 2010 que l'on doit à la gnouz-corporation.
Les tournois sont-ils uniquement l'occasion de s'affronter ou peut-on espérer y trouver autre chose ?
Beaucoup de joueurs ne vont pas aux tournois uniquement pour jouer. Au Stunfest de Rennes, par exemple, vous savez que ça va être 48H non-stop de pur "n'importe quoi", l'occasion de retrouver des potes, de s'amuser sur des jeux obscurs de baston (Breakers Revenge...) etc. A Cannes aussi, les joueurs de la World Game Cup apprécient le climat du sud, les ambiances à l'hôtel etc. Tous ces events sont forcément une occasion unique de partager sa passion avec des gens tout aussi impliqués.
Les relations entre les compétiteurs de tous horizons (pays, amis, régions, etc.) sont de quels ordres ?
Il y a parfois des rivalités légendaires, comme celle avec nos amis anglais ou américains. Avec les japonais, c'est différent. On a encore beaucoup tendance à les considérer comme des "Dieux" du Versus Fighting, alors forcément, les relations sont plutôt bonnes en général ! Globalement, on a toujours une excellente ambiance sur les tournois : les gens sont là pour passer du bon temps et ne se prennent pas trop au sérieux... enfin, la plupart du temps...
Y a-t-il des personnages sur la scène française du Versus Fighting qui t'ont marqué ? Si oui, peux-tu nous expliquer pourquoi ?
Beaucoup, à commencer par Kayane, que j'ai connu alors qu'elle n'avait que 9 ans, et qui continue toujours à jouer et même à organiser ! Dans ma tête, elle a toujours 9 ans !!! Il y aussi des légendes de la scène française comme V-Nash, un des joueurs 2D les plus doués et polyvalents qu'on ne voit plus trop... Dans le même ordre, Yamasaki (Olivier) est un des rares français à avoir tenu la tête aux japonais sur un jeu Capcom (Capcom Vs. SNK 2). Il y a aussi des joueurs comme DTN ou Malek, qui sont les seuls français à avoir gagné l'EVO aux USA (sur Soulcalibur II et Soulcalibur IV) et qui ont participé à faire de la France le pays considéré aujourd'hui comme le meilleur sur Soulcalibur. On peut songer également à Hayabusa, la légende de Dead Or Alive en France, qui avait fait une troisième place aux World Cyber Games sur Dead Or Alive 4 ! Il y a aussi Oro, un passionné qui a touché à tous les jeux avec beaucoup de... charisme ! La liste serait longue en fait et incomplète !
Y a-t-il une préparation spécifique à laquelle tu t'astreins avant un tournoi ?
Ca fait bien 5 ans que je n'ai pas participé à un tournoi important... En tant que joueur, je n'ai jamais été très doué. Mais pour ce qui est de la préparation, à l'époque, on faisait surtout des sessions nocturnes pré-tournois... Conclusion, on arrivait crevé le jour "J" et on se faisait lamentablement écraser !
Peux-tu nous expliquer le fonctionnement d'un tournoi ? Loser Bracket, Winner Bracket, pour les non initiés, ça veut dire quoi ?
En France, un tournoi classique se déroule avec une phase de poule où tout le monde s'affronte dans un même groupe. C'est comme à la Coupe du Monde de foot ! Puis, les meilleurs de la poule accèdent à l'arbre d'élimination finale, qui peut être en simple ou double élimination. La simple élimination, c'est comme un tournoi classique au tennis, par exemple. Vous perdez un match, vous êtes "out". En double éliminatoire, ceux qui gagnent continuent en "winner bracket" alors que ceux qui perdent s'affrontent en "loser bracket". A la fin, le gagnant de la "winner bracket" affronte celui de la "loser bracket".
Finale Loser Bracket sur Tekken 6 à la World Game Cup 2010 que l'ont doit à la gnouz-corporation.
Pour ceux qui ne connaissent pas, les commentaires des affrontements sont parfois confus, voire incompréhensibles, que conseilles-tu pour élargir sa culture et son vocabulaire dans le domaine ?
Il faut se rendre sur les sites qui parlent de votre jeu préféré ! www.basgrospoing.fr propose, par exemple, un bon nombre de dossiers avec notations pour chaque jeu. De même, sur les forums de www.console-league.com, vous trouverez des infos sur la plupart des jeux. N'oublions pas tekkenarena pour Tekken et pour s'habituer aux commentaires vidéo, le site de Ken Bogard !
Quels conseils donnerais-tu à ceux qui veulent se mettre à la compétition ?
Commencer par acquérir un petit niveau en jouant online, et surtout, passer du temps en "training" avec les connaissances qui sont dispos sur les sites de fight. Ensuite, le plus important, c'est de prendre de l'expérience contre des joueurs forts. Et pour ça, il n'y a pas de secret : il faut aller en salle d'arcade et/ou participer à tous les tournois possibles. C'est aussi la meilleure manière de rencontrer d'autres joueurs, et de découvrir de nouveaux aspects sur votre jeu préféré. Au début, vous allez beaucoup perdre, mais c'est bien le seul moyen de progresser...
Quelles sont les différences principales entre les jeux sur consoles et leur version Arcade (portages, etc.) ?
Elle est loin l'époque de la comparaison entre Street Fighter II Super Famicom et la version arcade ! Les adaptations consoles sont généralement de bonne facture de nos jours, surtout avec l'apparition des patchs et des DLC. Cependant, ce n'est pas toujours parfait : on peut penser à Tekken 6, graphiquement bâclé sur console, ou encore aux loadings toujours présents sur la plupart des jeux... Mais il faut avouer qu'avec des titres comme Super Street Fighter IV ou BlazBlue CS, on a vraiment plus de quoi se plaindre. La vraie différence ne vient plus du jeu lui-même ou du hardware console. Tout se joue au niveau du matériel ! En Arcade, vous avez les meilleurs sticks et boutons possibles, ainsi qu'un écran HD adapté, proche du 0 "input lag" (temps de réaction entre la pression sur un bouton et la réaction engendrée à l'écran). Sur console, il faut payer cher pour avoir une qualité de stick équivalente, et aucun écran LCD, ou plasma, du marché n'a vraiment un "input lag" parfait (surtout dans les grandes tailles). Pour l'instant, on peut affirmer que rien n'égal l'expérience de jeu sur une borne d'arcade, même quand le jeu lui-même n'est pas différent.
Qu'est-ce qui t'a motivé à te lancer dans une entreprise comme la World Game Cup ?
Officiellement ? L'envie de faire plaisir aux joueurs en organisant un gros tournoi en France pour l'amour du jeu ! Officieusement ? Une certaine jalousie des tournois comme le Tougeki au Japon ou l'Evo aux USA. Nous avions la prétention de penser que nous pourrions faire aussi bien que nos amis étrangers. Bref, l'ambition de proposer un tournoi d'envergure sur nos terres, histoire que le temps d'un week-end, le monde du versus fighting pose son regard sur notre beau pays. Il va de soi que tout cela est très beau sur le papier, et que les faits sont encore bien différents. On a fait beaucoup d'erreurs dans le passé, mais on apprend avec celles-ci, et on espère proposer cette année un spectacle passionnant pour les joueurs et les internautes de Gameblog !
Première partie de la finale Street Fighter IV lors de la World Game Cup 2010 réalisée par la gnouz-corporation.
Est-ce que la World Game Cup a modifié ta vision de la communauté du Versus Fighting ?
Non, ça reste une semaine de plaisir et une occasion unique de rencontrer des vieux amis et de s'en faire des nouveaux. C'est avant tout une fête du versus fighting. Quels que soient les éditions, les générations de joueurs, on y retrouve toujours le même délire. Ma vision du milieu changera sans doute le jour où il se professionnalisera...
Propos recueillis par Mimic