Réapparu lors du Inside Xbox de septembre dernier sous la forme d'un carnet de développeur décalé, le non moins déjanté Felix the Reaper n'aura pas entendu longtemps avant de s'offrir à nos petites mimines. Ce puzzle-game chapeauté par Kong Orange et édité par Daedalic Entertainment nous place dans la peau dudit Felix dans le rôle de la grande Faucheuse, bien déterminé à forcer le destin pour conquérir le coeur de la plantureuse mais non moins inaccessible Betty...
Qui a dit que la Mort devait forcément être une triste affaire ? Pas Felix en tout cas, qui compte bien mener à terme sa mission au sein du Ministère de la Mort afin d'espérer approcher sa dulcinée, qui officie elle au Ministère de la Vie. Et quoi de mieux pour se donner du courage que d'y aller le pied léger et de danser au rythme de la musique ?
Aimer à en (faire) mourir
Il sera donc question donc ce jeu d'entraîner la mort de malheureux innocents, le tout dans une ambiance joyeusement macabre. Au cours de ses missions, Felix se rend dans de petits espaces cloisonnés et répartis en cases sur lesquelles il peut se déplacer. Les environnements sont plutôt variés et colorés, et les personnages bien animés, à commencer par notre cher protagoniste, grosse barrique en costard dont l'innocence affichée n'est pas sans rappeler Baymax du film d'animation Les Nouveaux Héros. La façon dont il se trémousse sur sa case ou quand il se déplace ne manque pas de faire sourire, surtout dans un contexte scénaristique assez glauque. Par ailleurs, chaque mort provoquée par notre fossoyeur se conclut par une bonne giclée d'hémoglobine, le tout félicité par votre patron du Ministère de la Mort interprété par l'inattendu Patrick Stewart, dont les lignes de dialogues sont hélas trop peu nombreuses.
Corrélée à la danse, la musique occupe une place à part dans le titre puisqu'elle est dans sa grande majorité intradiégétique : il s'agit des morceaux qu'écoute en boucle Felix tout en se dandinant. Concoctée par une douzaine d'artistes ou de groupes issus de la scène indépendante danoise, la bande-son du jeu se démarque par son grand éclectisme, de l'electronica au jazz fusion en passant par la pop débridée ou la musique plus traditionnelle. Tous ces morceaux se marient étonnamment bien au tempo de l'aventure. À noter qu'il est possible de consulter plusieurs lignes consacrées aux artistes en question et à leurs projets perso via le menu, ainsi que des pages retraçant le processus créatif du jeu. Certaines musiques apparaissant dans les courtes mais délirantes intros et outros de chaque niveau puisent quant à elle dans le répertoire classique (la Sixième Symphonie de Haydn, le fameux Pizzicato du ballet Sylvia de Léo Delibes...), pour créer davantage de décalage.
Et marche à l'ombre
Comme évoqué précédemment, chaque niveau est fracturé en un ensemble de cases sur lesquelles Felix peut se déplacer. La difficulté réside en ce que notre replet de danseur, en sa qualité d'agent du Ministère de la Mort, ne peut se déplacer uniquement que sur les cases qui sont ombragées par un élément du décor. Ainsi, l'ombre de tel sapin s'étale sur trois cases, celle d'une tour sur six, etc. Heureusement, Felix dispose d'un pouvoir redoutable : celui de pouvoir contrôler l'orientation du soleil sur deux axes. Pratique, n'est-ce pas ? Pour qu'il puisse se mouvoir librement jusqu'à son objectif, il faut donc qu'une même case au moins se retrouve à l'ombre sur les deux axes.
Pour ce faire, Felix peut également déplacer divers objets et les poser sur la case adjacente à la sienne pour se frayer un nouveau chemin de ténèbres. Il ne peut toutefois pas déplacer ledit objet si le fait de le soulever inonde de lumière notre ami, d'où la difficulté de la tâche et l'obligation pour le joueur de bien réfléchir à ses déplacements. Pas de game over ici : Felix, brûlé par le soleil, repose bien vite l'objet. Il peut également en empiler certains pour générer une obscurité plus grande ou bien enclencher des mécanismes pour libérer la voie. Le but de la manoeuvre : entraîner le malheur de pauvres innocents en les mettant, par exemple, sur la trajectoire d'une lance tandis que le temps est arrêté.
Une fois la mission accomplie, Felix plie bagage et le temps reprend son cours, entraînant mort et désolation. Si les conséquences liées aux déviations de l'agent de la mort peuvent prêter à sourire au début, on finit par s'y habituer et les intros et outros animées deviennent lassantes.
Destination finale
Plutôt épuré, le gameplay en soi s'avère donc facile à maîtriser. Cependant, bien que l'on puisse déplacer à loisir la caméra et zoomer sur le personnage, on constate un certain manque de lisibilité, ou en tout cas d'anticipation de la portée des ombres. Par ailleurs, les objectifs étant parfois peu clairs, il deviendra très difficile, surtout dans les derniers niveaux, de ne pas avoir recours aux aides permises par le jeu à savoir : rembobiner au dernier mouvement réussi, aperçu de l'objectif et surtout aperçu de la prochaine étape. À l'inverse, il faut y faire appel avec parcimonie, sous peine de faire tout le jeu en automatique par la suite.
Comptez une demi-douzaine d'heures pour arriver au bout des vingt-trois missions du jeu, sachant qu'il est possible d'accéder à leur version "extrêmement extrême", variante plus ardue dans laquelle aucune aide n'est à la disposition du joueur et où certains items sont à glaner pour améliorer son score. Car oui, la notion de scoring est très importante dans le jeu et dépend de plusieurs facteurs : le nombre de brûlures du soleil, le nombre d'utilisation du générateur solaire, le nombre de cases traversées et le temps écoulé. En fonction des objectifs secondaires accomplis, il est possible d'acquérir plusieurs jetons par niveau qui eux-mêmes permettent de débloquer des niveaux bonus. En somme, le challenge est relevé et il y a de quoi faire.