Après l'exploration de drôles de pensées dans Stick it to the Man!, le studio suédois Zoink Games s'accroche à sa formule mêlant (un peu de) plate-forme 2D et (moult) énigmes pour s'aventurer littéralement au-delà, à travers le bien nommé Flipping Death. Le théâtre d'une expérience encore plus mortelle ?
Comme tout héritier moderne du point & click digne de ce nom, Flipping Death doit d'abord s'appuyer sur un récit mortel. Miracle, ce dernier est de nouveau signé Ryan North et servi par une mise en scène espiègle à couper le souffle, voire à mourir de rire, grâce à des doublages démoniaques (hélas un tantinet tronqués par les sous-titres en français). Et là tout est dit. Ou presque, puisqu'il serait incongru de dévoiler l'intrigue mortelle conduisant une employée enthousiaste des pompes funèbres à s'occuper des funestes tâches de la Mort en personne, temporairement du moins, les affres de la précarité professionnelle hein... Toujours est-il que ce job taillé à la faucille pour notre gothique héroïne consiste à aider les défunts à reposer en paix, via la résolution des problèmes qui les hantent et les relient encore au monde des vivants, dont elle peut d'ailleurs prendre possession, passant ainsi d'une dimension à l'autre.
L'art du second degré
Évidemment ces tourments se révèlent aussi bizarres que les protagonistes de cet univers en carton, et plutôt cartoon, de sorte que le ton résolument absurde distingue cette oeuvre de celles de Tim Burton pour s'approcher des Monty Python. Un humour noir omniprésent, qui empêche ses accents morbides de devenir sordides, à l'image de ce théâtre déglingué tantôt loufoque, tantôt inquiétant selon sa facette. Encore faut-il avoir le sens de la dérision. Si les phases de plate-forme, résolument superficielles (pour ne pas dire superflues), ne posent guère de soucis en dépit d'un maniement assez raide, notamment quand on doit user de la faux en guise de grappin, les énigmes s'avèrent parfois tordues. Allier réflexion, originalité et un aspect comique demeure naturellement un challenge essentiel de la discipline, mais les esprits malicieux de Zoink Games s'en sortent avec un rare talent que ne renierait pas Tim Schafer.
Pouvoirs occultes de suggestion
Déjà, l'opportunité de lire dans les pensées plus ou moins dingues des personnages donne de précieux indices, à l'instar de leurs pouvoir carrément zinzins, entre le gigolo à la langue bien pendue, le testeur assidu de crèmes glacées et le dentiste aux fraises - mention spéciale au truculent "Pokeman". Le cas échéant, aucun risque de rester bloqué, car en plus d'une carte qui indique le point d'intérêt suivant (et permet de se téléporter directement à proximité), les conseils listent précisément les actions à effectuer pour avancer. Et ces coups de pouce potentiellement nuisibles pour l'intérêt de l'expérience ne concernent pas les divers défis optionnels, quelquefois ardus et encore plus mabouls, qui invitent à se replonger dans cette atmosphère délicieusement jazzy, chapitre après chapitre, d'autant que l'aventure ne se révèle nullement longuette. Décidément, la mort lui va si bien.