Kickstarté à hauteur de 5,5 millions de dollars en 2015, le toujours trop discret et pas daté Bloodstained : Ritual of the Night avait dépassé le palier assurant le développement d'un "prequel mini-game". Révélé il y a peu sous le titre Bloodstained : Curse of the Moon, ce projet annexe à la production supervisée par Koji "IGA" Igarashi est accessible à tout le monde ou presque. Reste à savoir si les plus affamés trouveront en ce petit titre parfumé à la NES un bon en-Cas...tlevania.
Que les amateurs de "Metroidvania" imaginant tomber sur une sorte de Symphony of the Night sauce Famicom refrènent leurs ardeurs immédiatement. La formule avec RPG et exploration, ce sera pour le jeu complet. Bloodstained : Curse of the Moon, lui, s'adresse aux amateurs de la première période, celle des jeux d'action linéaires en 2D, où l'on surveillait sa jauge de vie et celle magie, employée pour les armes secondaires, comme le lait sur le feu. Mais linéaire... le "mini-jeu" d'Inti Creates , auquel participe IGA, monsieur Castlevania de la fin des années 90 à 2010, ne saurait se voir qualifié comme tel. Pour cause, il ne faut pas beaucoup de temps pour réaliser que ce jeu d'action et de plate-forme 2D rend un hommage plus qu'appuyé à Castlevania III : Dracula's Curse, épisode trop peu connu sous nos latitudes qui proposait de multiples chemins et différents personnages jouables. On pourrait même jurer qu'il en est la suite non-officielle.
Quatre à la suite
Si cette préquelle vous place d'abord dans la peau de Zangetsu, bretteur maudit désireux d'éradiquer les démons de la surface de la Terre, la suite vous permettra de libérer trois autres figures apportant leurs spécificités qui ne sont pas sans évoquer les héros du classique NES sus-cité. On aura le loisir de recruter Miriam (héroïne de Ritual of the Night), armée d'un fouet et capable de sauts plus amples et de glissades dans des espaces plus étroits - très Trevor Belmont. Viendra ensuite Alfred, magicien peu résistant à l'allonge grotesque mais qui, via les armes secondaires cachées dans les chandeliers violets, saura user de sorts très puissants comme un cercle de feu l'entourant une poignée de secondes - Sypha Belnades. Enfin, le très poseur Gebel se joindra à nous pour nous faire profiter de son attaque orientée vers le haut et de sa transformation en chauve-souris - bonjour Alucard.
En connaissant les particularités, les forces et faiblesses de chacun, la baston et l'exploration s'aborderont différemment. Avec une belle subtilité : on peut switcher à tout moment à l'aide des boutons de tranche, un léger temps de pause nous protégeant pour éviter toute injustice. Les barres de vie étant individuelles et la mort d'un membre définitive pour le reste du stage (ce qui n'est pas sans faire penser au Teenage Mutant Ninja Turtles de 1989), cela ajoute un petit côté stratégique à la progression, rythmée par votre jauge d'énergie magique. Et un peu de flippe au moment où des embranchements, nombreux, se présentent. Comme dans Castlevania III, suivant le chemin choisi, vous accéderez parfois à des bonus améliorant certaines caractéristiques. Mais aussi à des zones un peu plus sacquées (à base de plateformes mouvantes riquiqui ou friables, alors que des bestioles volantes semblent téléguidées vers votre sprite, par exemple...) et/ou des secrets et raccourcis sympathiques. De quoi, normalement, assurer l'envie de le parcourir deux fois au minimum sans trop sentir le sentiment de redite.
Bon sang ne saurait mentir
Fort d'un pixel-art fringant et de sonorités chiptunes plus que réussies qui évoqueront bien des souvenirs et feront retourner en enfance les joueurs ayant connu la période 8-Bit, Curse of the Moon se présente comme un jeu NES boosté et bourré de détails. Que cela soit dans ses ennemis de base, dont beaucoup sont des redesigns malins de monstres de Castlevania, ou dans les différents environnements conçus avec application pour nous faire stresser, surtout après la première moitié traversée, le travail s'avère impeccable. La palme sera décernée aux boss, souvent gigantesques et surprenants (notamment après avoir été occis...), et tellement bien dessinés.
Les affrontements ponctuant chacun des niveaux nous mettent aux prises avec des créatures amusantes à combattre, aux patterns pas forcément complexes à identifier, mais exigeant presque à coup un bon sens du timing... Entravé parfois par le fait que le saut - à l'ancienne, précalibré et sans manoeuvre aérienne hormis un changement de direction d'attaque - ait parfois du mal à répondre lorsqu'une direction est imprimée. Il s'agit cela dit du seul point noir au tableau d'une maniabilité certes rigide, fidèle au matériau d'origine, mais pas du tout antipathique. D'ailleurs, on appréciera de pouvoir bondir directement sur un escalier, même s'il est impossible d'en descendre comme dans Super Castlevania IV.
Another 8-Bit the Dust ?
Les sensations comme l'esthétique et le level design lui assureront une certaine bienveillance. Mais quel est le public visé par Bloodstained : Curse of the Moon ? Réponse : tout le monde. En proposant une difficulté Vétéran qui sanctionne un contact par un léger, et parfois fatal, recul, et n'offre qu'un nombre de vies limitées avant le Game Over, il s'adjuge ceux qui recherchent la performance et le dépassement de soi. Avec ses checkpoints généreux et son mode Casual où l'on dispose d'un nombre d'essais infini, ce sont les plus pressés, les néophytes et les gens ayant un rapport compliqué à la frustration qui vont être contents. Pas fort longtemps estimeront certains, puisqu'un premier run des 8 niveaux initiaux, en campagne dite Normal, pourra ne prendre qu'un peu plus d'une heure. En mode Nightmare, donnant accès à un autre dénouement et une neuvième zone, vous pourrez compter un peu plus. Mais n'oublions pas d'autres cachotteries bien gardées et à découvrir, surtout pour Zangetsu. Largement de quoi se faire un bon plaisir rétro en attendant Ritual of the Night.