Au Hall of Fame des titres que je souhaitais voir portés sur Switch figurait Football Manager. Au sommet d'une liste de prospects talentueux. Pouvoir réaliser ses gammes comme entraîneur où et quand je le voulais, sur le même support, pour des sessions courtes ou des nuits blanches, était certes dangereux pour ma vie sociale, mais constituait un petit fantasme pour l'aficionado de cette série que je suis. Alors, quand Sports Interactive a annoncé (en catimini) la nouvelle, j'ai bondi de joie depuis mon banc de touche, façon Jürgen Klopp, le très communicatif coach de Liverpool. Il faut dire que le portage de Football Manager sur la dernière née de Nintendo sonnait comme une évidence pour les joueurs qui disposaient de moins de temps à consacrer au foot virtuel. Restait à le peaufiner et à le rendre accessible, à la manette comme à l'écran tactile, pour ne pas entraver la réputation de cette simulation de gestion, estimée par les maîtres tacticiens comme archi-complète et chronophage.

Un cocktail plus light que zéro

Cette édition se rapproche nettement plus de l'opus de base que de celui disponible sur appareils mobiles, qui tourne qui plus est en 2D. Et les joueurs les plus exigeants ne peuvent que s'en réjouir. Concrètement, il s'agit d'une version légèrement moins étoffée, qui mise davantage sur la tactique et les transferts que sur l'aspect psychologique des joueurs (pas de conférences de presse, ni de causeries). On retrouve en effet toute l'âme de FM avec les différentes possibilités tactiques, la gestion de la politique sportive (recrutement, budget, marketing...), la création d'un programme d'entraînement adapté et bien sûr le déroulement d'un match de A à Z. En parallèle, les résultats sportifs détermineront l'évolution de notre modeste carrière, qui peut nous mener tout en haut comme au FC Pole Emploi ou sur le banc des consultants chez Canal+. Ce qui revient au même. De quoi bien s'occuper, d'autant que cet épisode "light" propose tous les championnats habituels (50 !) et les joueurs concernés. Cette base de données habituellement faramineuse a été réduite à trois pays maximum (et au gratin du foot mondial), ce qui affaiblit grandement l'expérience, néanmoins correcte pour une aventure nomade.

Au doigt et à l'oeil

Car, il ne faut pas se mentir : Football Manager Touch 2018 a été conçu en priorité pour y jouer sur console portable. Le jeu demandant essentiellement de naviguer dans les nombreuses pages de données, une utilisation intuitive se devait d'être présente, et l'association Joy-Con / tactile est très complémentaire en mode portable. Ce qui n'est pas tout à fait le cas en mode salon, le joystick étant nettement moins pratique, rapide et fluide qu'une souris d'ordinateur. Pour pallier ces faiblesses, Sports Interactive a eu l'excellente idée de proposer des raccourcis bien pensés pour accéder aux menus, faire un retour en arrière ou accélérer le temps, ou bien faire défiler les différentes interactions possibles. Soit le meilleur des deux mondes pour un traitement efficace à défaut d'être galactique. D'un point de vue ergonomique, ce n'est donc pas le football total de la Champion's League, mais plutôt le haut de tableau de notre chère Ligue 1.

En revanche, le moteur 3D n'a pas été retouché par rapport à la version PC. Il n'a toujours pas le panache de l'attaque de Liverpool mais assure l'essentiel, permettant de visualiser les déplacements des joueurs sur le terrain et d'ajuster notre coaching en fonction de nos observations. Sur notre carnet, on notera quelques légers temps de chargement intempestifs, qui ne gâchent cependant pas la progression de nos actions. Tout juste la ralentit-elle, un peu comme si on touchait le ballon une fois de trop avant de lancer notre attaquant. Le cadre austère, avec son défilé de menus et d'informations, fera le bonheur des joueurs avertis et habitués à cette interface, mais pourrait rebuter les nouveaux venus. D'autant qu'aucun adjoint du centre de formation n'a été délégué pour les guider dans leur apprentissage.

Le management pour tous ?

Car, si FM Touch 2018 fait honneur à la richesse de la licence, LA problématique de cette mouture est de savoir à qui elle s'adresse vraiment. La communauté fidèle accueillera ce portage comme une bénédiction, appréciant de pouvoir y jouer de partout, ce qui renforce son caractère hautement addictif. Mais elle regrettera l'absence d'une cross-save PC/Switch pour lui permettre de progresser avec une sauvegarde unique sur deux supports différents. D'un autre côté, un certain scepticisme pourrait accompagner les "bleus", lâchés au beau milieu d'une saison avec un effectif en perdition, sans aucune assistance et tout à faire pour sauver le club d'une relégation... Mais à force de labeur, d'ingéniosité et de persévérance, ils pourraient vite rétablir la situation et même y prendre du plaisir.