Après un premier DLC en demi-teinte et faisant plutôt office d'apéritif, voici venue l'heure du plat de résistance. Après avoir parcouru l'Empire des Pharaons en long en large et en travers, Bayek est appelé en renfort du côté de la ville de Thèbes, en quête d'une relique déjà millénaire qui va le conduire de l'autre côté du miroir...
Également situé quatre ans après l'intrigue principale, The Curse of the Pharaohs met donc lui aussi de côté la courageuse Aya pour se recentrer sur l'ex-paternel déchu, toujours en quête de rédemption. Fraîchement débarqué dans la superbe ville de Thèbes, Bayek va comme qui dirait repartir de zéro, puisque personne ne semble avoir eu vent de ses exploits dans cette lointaine contrée autrefois capitale de l'Empire.
Une très grosse Thèbes
Ce nouvel environnement va plus que jamais jouer sur l'intrigue de ce second DLC, vendu par Ubisoft comme une extension à l'ancienne : nobody parmi les nobodies, Bayek perd symboliquement l'influence qu'il pouvait exercer en tant qu'ex-Medjay dans sa province natale. Et si la perspective de débarquer dans l'actuelle Louxor n'était pas encore synonyme de farniente au bord du Nil, l'enquête vendue dès le départ va nous conduire loin, très loin, du terrestre plancher des taureaux. Les équipes d'Ubisoft Montréal ne perdrent d'ailleurs pas une minute pour dévoiler d'entrée de jeu le parti-pris fantastique qui structure The Curse of the Pharaohs, puisque l'aventure commence par un combat en pleine rue contre un souverain d'antan revenu d'entre les morts.
L'enquête de Bayek le conduira rapidement sur la trace d'une relique a priori responsable de ce divin bazar, une chasse au trésor qui sera comme vous l'imaginez l'occasion d'effectuer de nombreux aller-retours dans cette merveilleuse contrée. Inutile se voiler la face : sur le plan visuel et artistique, cette extension n'a pas à rougir face à l'aventure originale. La ville de Thèbes est une remarquable entrée en matière, que ce soit via ses temples démesurément majestueux ou ses faubourgs anarchiques, mais le meilleur est évidemment à venir : rapidement attiré vers la légendaire Vallée des Rois, Bayek s'embarque pour un voyage dans l'Au-Delà que nous ne sommes pas prêts d'oublier.
Anubis Repetita
Il se trouve en effet que tout le grabuge en cours dans la cité prend la forme d'une colère d'outre-tombe menée par quelques uns des plus illustres noms de l'Egypte Antique. Visitant d'abord le tombeau de la reine Nefertiti, Bayek est finalement entraîné dans un espace en dehors du temps et de l'espace : l'arrivée dans l'Au-Delà est à tous les niveaux somptueuse, et semble avoir poussé les équipes d'Ubisoft Montréal vers des sommets que l'on espère constants pour la série. Jouant à fond la carte du fantastique, tous les délires visuels sont désormais permis : sur des champs de blés infinis voguent des barques de passeurs recouvertes d'or, à côtés desquelles il faudra combattre des scorpions géants et autres soldats aux faux airs d'Anubis.
Dans l'absolu, les mécaniques ne sont pas pour autant transformées : il faudra toujours infiltrer des palais remplis à craquer de gardes et de trésors pour voler des objets (parfois) ou assassiner d'innombrables cibles (souvent), histoire de faire progresser une quête principale à tiroirs qui finit par traîner un peu en longueur. Les vétérans d'Assassin's Creed Origins (et de la série dans sa globalité) ne seront pas surpris de découvrir que les véritables responsables du retour des Pharaons d'antan se cachent depuis le début en pleine lumière : bien que l'écriture des quêtes principales et secondaires se classent plutôt dans le haut du panier, vous n'échapperez pas à la pelletée habituelle de "Hahaha, c'était moi depuis le début !". Dommage que les twists ne s'émancipent pas autant que l'aspect visuel de cette extension, car nous aurions alors eu affaire à un DLC tout simplement indispensable.
Nefertiti et Grosminet
Heureusement, l'Au-Delà ne prend pas la forme d'un one-shot joliment marketé : décliné en plusieurs zones à l'esthétique toujours différente et joliment inspirées, ces sous-zones démultiplient l'espace de jeu en offrant à chaque fois de nouvelles perspectives sur le plan artistique. Après avoir apaisé Nefertit au milieu de ses champs de blés, Bayek traquera les statues de Sphynx du temple d'Akhenaton, pour finir son voyage dans la vallée désolée d'un tyran mégalo aveuglé par son incommensurable melon. The Curse of the Pharaohs réussit ainsi à pousser la réflexion entamée par l'épisode original, en choisissant de raconter les angoisses et les questionnements d'un peuple déjà deux fois millénaires sur ses divinités changeantes.
Capables de déchiffrer les papyrus de leurs ancêtres, les habitants de Thèbes amèneront Bayek à s'interroger sur le statut même de divinité et de mortalité, un bel exercice narratif qui pousse à constamment aller de l'avant, et fera bien vite défiler la quinzaine d'heures (qui frisera la trentaine pour les complétistes et ceux qui se lanceront sur l'énigmatique piste des trésors des Pharaons déchus) nécessaires à la conclusion de cette aventure osée. Il ne faudra en revanche pas s'attendre à de nouvelles mécaniques, tant The Curse of the Pharaohs fait le pari du dépaysement total pour justifier de sa seule existence. Les fans seront aux anges, les détracteurs n'y trouveront rien de plus. Ubisoft aura en tous cas eu pour une fois la bonne idée de parler à tous les joueurs, puisque ce second DLC vous propose de commencer directement une nouvelle sauvegarde au niveau 45, histoire de raccrocher immédiatement le train en marche. Une bonne initiative qui aurait mérité d'exister dès le The Hidden Ones.