Si c'est parfois dans les vieux pots que l'on fait les meilleures soupes, la cuisine requiert parfois un zeste de folie pour ne pas tomber dans la fatidique routine qui nous fait oublier pourquoi manger est un plaisir. Et si le J-RPG est un genre qui reste fondamentalement attaché à ses racines, un bâton de dynamite par-ci par-là ne peut pas faire de mal. Si ?
Assez clairement inspiré d'autres expériences du même genre, parmi lesquelles on ne pourra s'empêcher de citer le sympathique Half-Minute Hero, The Longest 5 Minutes fait le pari d'inverser complètement sa narration pour vous faire débuter l'aventure sous le nez du boss de fin. Un pari au départ osé, qui ne suffit cependant pas à lui seul pour apporter un peu de fraîcheur au genre. Celui qui vient de citer Final Fantasy XV peut également sortir. Merci.
Le Code Quantique
Fidèle à sa promesse initiale, le "nouveau" jeu de Nippon Ichi Software (disponible sur PS Vita depuis 2016 au Japon) vous propulse effectivement face au Roi des Démons, un combat qui marque l'épopée dantesque que vous venez de mener à bien avec vos trois traditionnels compagnons. Mais un petit problème technique de dernière minute vient retarder l'enregistrement du podcast semer le trouble chez nos aventuriers, puisque votre personnage perd soudainement la mémoire. Incapable de porter le coup fatal au grand méchant, vos camarades vont alors tenter de stimuler malgré tout votre cervelet ramollo.
Et c'est donc à ce moment-là que le jeu vous renvoie au tout début de l'aventure, qui s'annonce en dehors de sa narration volontairement décousue des plus classiques : après avoir regroupé vos compagnons, vous voici parti pour une dizaine d'heures de combats aléatoires expéditifs et autres quêtes à base d'items impliquant une galerie de personnages souvent loufoques et un brin dérangés. Mais en se contentant de quelques ellipses narratives qui font gagner un temps précieux aux rôlistes pressés, The Longest 5 Minutes fait peut-être un peu rapidement fi de son originalité pour retomber dans un classicisme des plus inattendus.
Le J-RPG pour les flemmards
Concrètement, le jeu emprunte à peu près tous les codes du J-RPG classique en optant pour un ton aussi décomplexé que la droite de Laurent Wauquiez, qui lui donne du coup une certaine légèreté bienvenue, et colle en plus parfaitement à son rythme tambour battant. The Longest 5 Minutes se veut en effet être un concentré d'une dizaine d'heures qui ne s'embarrasse pas des longueurs souvent inhérentes au genre, pour ne conserver que les moments forts de l'aventure. Chaque chapitre sera ainsi déclenché par une bribe de souvenir remontant du plus profond du cervelet ramolli de notre héros Flash Back. Oui : le héros s'appelle Flash Back.
Exit donc les interminables déambulations et autres donjons sans fin : chaque séquence du jeu dépeint des pastilles espacées et rythmées par les ellipses, qui augmentent dans le même temps votre niveau sans rien faire. Une sorte d'anti-levelling au service de l'efficacité. Il ne vous restera donc plus qu'à explorer villes portuaires et autres sombres grottes à la recherche des items ou personnages qui feront avancer l'intrigue en vous replaçant face au boss de fin. Si chacune de la quarantaine de séquences vous oblige à atteindre un certain objectif, des missions annexes confèrent un bonus d'expérience et vous obligent à explorer plus en profondeur les petits environnements mis à votre disposition.
Cinq longues minutes, douche comprise
Et si ce découpage s'avère somme toute sympathique et mené tambour battant, The Longest 5 Minutes ne propose finalement rien de plus que son pitch initial : dérouler un semblant de J-RPG en commençant par la fin, sans en profiter pour jouer sur la narration ou surprendre vraiment son auditoire. Certes, le jeu propose en cours de route quelques choix tranchés, mais leur impact sur la trame scénaristique reste au final très confidentiel. On aurait forcément apprécié quelques prises de risque au vu de la promesse de départ. Ah, et une configuration de touches plus évidente aussi : avec si peu de commandes, il est assez étonnant de se perdre dans les différents menus.
Et si le reste du système de jeu se veut des plus classiques, son rythme effréné et son découpage apéritif lui confère un dynamisme monstrueusement sympathique pour les vieux routards du jeu de rôle nippon qui auraient pour une fois envie d'aller droit à l'essentiel, et ce sans passer par un New Game + forcément long à débloquer. On déplorera simplement que les combats se résument finalement à bourriner comme un sagouin les attaques physiques, puisqu'elles se révèlent les trois quarts du temps suffisantes pour opérer un véritable génocide dans les règles de l'art. Dommage pour les magies, reléguées au second plan.