Gambitious continue son bonhomme de chemin en éditant des jeux indépendants avec de petites équipes et des idées bien rodées. Avec Redeemer, c'est presque un jeu familial qui est proposé, puisqu'il a été développé par cinq Russes. Oui, cinq personnes pour un jeu complet, on est presque revenu dans les années 80, où un garage pouvait suffire pour créer un jeu. Le "garage" de ces russes s'appelle Sobaka Studio en l'occurrence.
Pour autant, Redeemer n'est pas un jeu à la petite semaine. Il est développé avec l'Unreal Engine 4 qui affiche un point de vue "top-down". Un choix qui fleure bon les run&gun de nos décennies adolescentes et qui a été moult fois repris dans des productions récentes. On pense notamment à Helldivers, Hotline Miami ou encore Gauntlet, qui a bénéficié d'un remake il y a déjà quelques années.
Le scénario ne dénote pas avec ce choix technique et fait partie des plus beaux poncifs de ces mêmes années 80-90. Vasily, en désaccord profond avec l'évolution de son activité de mercenaire pour des humains augmentés, quitte son frère d'armes pour se retirer dans un monastère. Ce faisant, il trouve la paix en préparant la guerre, puisqu'il se forme et s'entraîne en profitant de la paix des moines. Jusqu'au jour où ses anciens camarades trouvent le chemin du monastère et ne l'attaquent en dévastant tout sur leur passage. Il n'en faut pas plus pour que notre homme déchaîne toute sa fureur et sa violence contenues durant sa retraite.
Du sang, des larmes et de la violence
On a déjà cité Hotline Miami en référence pour définir en partie Redeemer et on peut le citer à nouveau pour son côté violent. Dans Redeemer, la violence est omniprésente et totalement assumée. Il s'agit de défoncer, d'écraser, de projeter, de laminer, de brûler, de déchiqueter, d'empaler... et de fait, de tout redécorer façon hémoglobine et autres fluides peu ragoûtants.
Vasily était un mercenaire qui n'avait connu que la violence, le fait de la contrôler pendant plusieurs années n'a fait que l'accumuler et les vannes sont désormais grandes ouvertes. Les bourre pifs sont donc aussi violents que dans un Mother Russia Bleeds, ce qui n'est pas peu dire. Le rythme est effréné et les environnements sont rapidement jonchés de cadavres ensanglantés.
Heureusement, si cette violence définit une ambiance et que son outrance confirme que nous sommes bien dans un jeu vidéo, elle n'est pas une finalité. Derrière tout cela, il y a un gameplay qui, sans révolutionner le genre, est efficace et bien pensé.
Entre beat'em up et shooter
Peut être que les cinq loustics de Sobaka ont eu des débats à ce sujet. Faut-il faire un shooter ou plutôt favoriser le corps à corps ? Pour contenter tout le monde, faisons les deux ! Redeemer combine en effet les deux façons de jouer. À poings nus ou avec un accessoire de corps à corps, Vasily peut également utiliser des armes à feu ou des armes énergétiques.
Massue simple ou électrique, torches, haches, couteaux, katanas pour le corps à corps et pistolets, fusils à pompe ou fusils d'assaut pour tenir les importuns à distance. Toutes ces armes ont des munitions limitées ou une durabilité définie, de sorte qu'il faut sans arrêt jongler en changeant d'outil.
La variété des adversaires et leur nombre font qu'il faut souvent planifier les déplacements et ne pas foncer tête baissée dans la mêlée. Il faut "agro" par petits groupes et gérer chaque "paquet" séparément. La possibilité de déplacer (de façon limitée) la caméra pour voir ce qui se passe juste à côté est une excellente idée qui pousse à prendre en compte certains paramètres pour appliquer la bonne stratégie. Par exemple, savoir exactement où se trouvent les armes qu'ont laissés les cadavres sur le chemin afin de reculer régulièrement devant une adversité trop puissante et l'affaiblir au fur et à mesure. Redeemer est donc violent, mais pas grossier, son gameplay est emprunt d'une certaine finesse...
Décapiter avec finesse
Cette finesse, on la retrouve avec un système plébiscité dans Batman, à savoir des contres à déclencher au moment précis où l'assaillant s'apprête à lancer son attaque. La parade provoque alors un temps de sidération propice à réaliser des enchaînements douloureux et létaux en retour.
Finesse toujours, avec l'utilisation permanente des éléments du décor pour pousser dans l'acide, éjecter par-dessus bord, découper à la scie circulaire, broyer, concasser ou écraser contre un pilier. Encore une fois, la violence est inouïe, mais elle est mise en oeuvre avec "goût". On peut par exemple reculer pour attirer l'adversaire armé près d'une scie circulaire, le découper, s'emparer de son arme pour vider le chargeur sur un gros balaise, lui piquer sa massue et faire un prix de groupe en tournoyant pour le reste du paquet.
Il faut aussi parfois savoir jouer des mouvements de mise à mort, car ils font remonter la vie. Dans Redeemer, pas de soins qui font remonter la jauge. Tout est axé vers l'action et le "style". Sans ces finish et même si vous récupérez un peu de vie avant de mourir, vous n'irez pas très loin. D'ailleurs il est plus judicieux de ne pas éliminer tout le monde avec des coups puissants, mais de les affaiblir assez pour enchaîner les finish et ainsi gérer sa jauge de vie.
Une proposition de meurtre honnête
Redeemer comporte 16 chapitres et un final ponctués par des rencontres de boss et mini-boss. D'ailleurs les mini boss du début finissent par devenir des adversaires rencontrés plus régulièrement, la difficulté allant crescendo. Malgré les points intermédiaires de sauvegarde de chaque chapitre il aura fallu une dizaine d'heures pour en venir à bout en mode normal. La difficulté commence vraiment à augmenter à partir du chapitre 10.
Ce faisant, des éléments de scénario (dignes des années 80) sont débloqués, ainsi que des arènes jouables en multi pour affronter des vagues successives d'adversaires, jusqu'à ce que mort s'en suive. Un mode Horde qui fait partie des touches de modernité apportées à Redeemer. Pour les maniaques qui en veulent encore, il existe un mode de difficulté "éprouvant" et des succès qui demandent des réalisation spécifiques. Par exemple noyer un adversaire dans un certain niveau, ou éliminer X adversaires en utilisant le décor. Des parchemins cachés cochent également la case "éléments secrets à trouver", bref : le cahier des charges est complet.
Concernant les points à améliorer, le rythme de certains niveaux est un peu monotone, un écueil qu'il est souvent difficile d'éviter dans ce genre de production. De plus, l'IA est mise à défaut de temps en temps en restant bêtement bloquée dans certaines parties du décor. Cela reste anecdotique et fera certainement l'objet d'un patch.
Malgré cela, Redeemer est une proposition d'excellente qualité, surtout pour un prix qui est très abordable dès le lancement. Une très bonne occasion de renouer avec le style top-down qui garde ses codes les plus ancrés, tout en apportant les bienfaits du jeu vidéo moderne.