Deuxième tentative pour Kylotonn avec ce WRC 6. Alors que l'épisode précédent se démarquait principalement par son manque de finition, la faute à un changement de développeur probablement trop brusque, ce nouvel opus n'a désormais plus d'excuse pour justifier de la moindre errance. Nouveau moteur physique ? Nouvelles améliorations graphiques ? Carrière remaniée ? Voyons donc ce que ce soi-disant spécialiste de l'eSport a dans le ventre...
Si on fait un petit tour des jeux de rallye déjà en place, on se rend compte qu'à part Dirt Rally, personne n'assure véritablement le spectacle. Pourtant, l'hégémonie du titre de Codemasters ne tient principalement qu'à son placement en tant que simulation pure et dure, pas forcément le genre de jeu qui plaît au grand public, de par sa difficulté assez élevée et sa prise en main qui demande un peu de temps. Il y a donc clairement un créneau pour quelque chose de plus accessible, de plus fun, sans tomber forcément dans l'arcade. Et c'est là que WRC 6 essaie de se placer.
Le rallye pour tous
Dès la première course, censée analyser votre type de conduite, on ressent une sacrée évolution dans le pilotage. Plus fluide, plus réactif et clairement plus facile à maitriser, le moteur physique rappelle rapidement ce que certains Colin McRae Rally 3 et autres Sega Rally Online avaient essayé d'instaurer. De bonnes sensations, un peu d'assistance dans les virages, de quoi permettre à tout le monde d'aborder la course contre le chronomètre sans forcément être un as du tout terrain. On n'est pas vraiment dans la simulation, mais on ne plonge pas non plus dans l'arcade. Et ma foi, pourquoi pas, si c'est bien fait.
Ici, l'impression de puissance est bien présente et la traction comme le freinage peuvent rapidement être de bons alliés contre le défilement du chronomètre. On se fait vraiment plaisir à enchaîner les différentes difficultés, à jouer avec les transferts de masses ou l'adhérence assez palpable des pneumatiques, en perte comme en reprise, avec un grip assez généreux par rapport à WRC 5. Et si on est assez loin de la profondeur de gameplay d'un Dirt Rally, de son « réalisme », on apprécie la bienveillance globale du titre qui met l'accent sur l'apprentissage des courbes et des différentes techniques plus que sur la maîtrise de son véhicule, dans la douleur des chevaux incontrôlables. WRC 6 est tolérant, c'est vrai, mais il est loin d'être insipide avec une balance simulation/arcade qui sait finalement se défendre.
Ainsi, on avale les kilomètres sur toutes sortes de surfaces, dans des conditions météo plus ou moins difficiles, mais avec une facilité un peu déconcertante. Si la neige, l'asphalte, la terre, offrent bien des comportements et des niveaux de difficultés différents, l'ensemble reste plutôt lisse, manquant parfois de caractère, surtout face à la concurrence. On a aussi droit à des ornières ou des cailloux sur la route, bien visibles, mais qui ne modifient en rien le comportement de la voiture... comme s'ils n'étaient que cosmétiques. Ajoutez à cela des abords un peu trop faciles à traverser, sans aucune perte d'adhérence due au changement de surface, et vous comprendrez que WRC 6 a d'ores et déjà des airs d'ancienne génération, avant même qu'on aborde les questions graphiques, ce que je vous réserve pour le dessert.
Prenez le contrôle
Côté manette, on apprécie de pouvoir modifier les actions de chaque touche à loisir, de jouer au stick ou à la croix directionnelle, de placer son frein à main sur un bouton ou sur un axe. Et même si le réglage de base de la direction est tout à fait jouable et pertinent, les pointilleux aimeront fouiller dans les possibilités offertes en termes de centre mort ou de courbes de valeurs pour tout ce qui est analogique ou vibrant. Sachant que tout ceci est accessible depuis le menu principal ou en course, sans temps de chargement supplémentaire. Un vrai bonheur. En résulte une direction assez nerveuse mais qui ne prend jamais de court comme dans Assetto Corsa, une accélération facile à doser avec les vibrations qui vont bien et un freinage, au pied ou à main, qui s'acquiert assez rapidement, quand bien même il demande un peu d'apprentissage et d'anticipation.
Au volant, c'est là encore une bonne surprise. Les modèles à motorisation brushless s'en donnent à coeur joie avec des vibrations en rumble, différentes d'une surface à l'autre et qui, à défaut de réalisme, donnent un peu de corps au pilotage. Un point sur lequel WRC 6 surclasse la concurrence, y compris sur piste. Quant aux possesseurs de G29 et autres T150 FF, ils iront rapidement baisser ce niveau de vibrations pour ne garder que le retour de force de base, histoire de ne pas subir les à-coups nombreux et un peu trop brutaux de leur volant. Enfin, il est bon de signaler que l'utilisation d'un frein à main déporté est quasi obligatoire pour apprécier le terrain de jeu, le nombre de virages en épingle nécessitant cette fonction étant quand même assez élevé.
Les réglages de la voiture, enfin, se limitent aux fonctions du châssis, des amortisseurs et de quelques loufoqueries quasi inutiles. Déjà parce que les néophytes n'y trouveront aucune explication (alors qu'un texte pour chaque curseur aurait un peu aidé), ensuite parce que leur action ne modifie pas vraiment le comportement de la voiture, et enfin parce qu'il manque l'essentiel, à savoir les réglages de boîte, de moteur, de pression des pneus, etc. On est quand même heureux de voir que les vues intérieure comme extérieure sont paramétrables avec un réglage à la fois simple et efficace. D'ailleurs, la vue arrière, quand on voit la voiture donc, a gagné en jouabilité et en sensations grâce à un effet de zoom prononcé lors des freinages, désactivables à la volée.
Officiel on vous dit
WRC 6 est LE jeu officiel de cette licence de la FIA, et il le crie haut et fort. Entendez par là que, contrairement à Dirt Rally, vous trouverez ici l'intégralité des lieux du championnat 2016, y compris la Chine qui devait faire son grand retour cette année, mais a été annulée. Idem avec les pilotes, tous présents au sein des catégories Junior, WRC 2 ou WRC, avec les voitures respectives qui vont bien. Et si on n'a toujours pas droit aux tracés réels, capturés au laser comme pour Assetto Corsa (ce qui en soi est tout à fait logique, puisque la plupart de ces rallyes n'ont pas encore eu lieu), il faut avouer que ceux qu'on nous propose sont cohérents et intéressants à jouer. Alors bien sûr, ceux qui ont déjà terminé WRC 5 retrouveront la plupart des lieux précédemment modélisés, mais avec de substantielles améliorations ou changements au niveau des tracés, des ambiances, des animations.
En revanche, la carrière ne propose presque rien de neuf. Même déroulement, mêmes conditions d'évolution, même interaction avec l'équipe... et même ennui à la longue. On commence tranquillement en Junior et on grimpe petit à petit au fil des résultats, après avoir sélectionné une team aux exigences variables, demandant plus ou moins de performance ou de respect de la voiture. Et pour les autres détails, je vous renvoie directement au test de WRC 5. La seule évolution ayant son petit effet sur le gameplay étant la possibilité de réparer en course. Un pneu crevé et un accès rapide au menu pour une réparation vous coûteront quelques secondes, mais vous pourrez repartir frais comme un gardon. On évite ainsi les fins de parcours ou de championnat sur 3 roues, avec la boîte cassée et le moteur fusillé. Ou du moins on a la possibilité de les éviter, car rien ne vous oblige à en profiter si la souffrance vous plaît tant que ça
Surtout que l'IA reste tout de même super gentille, même à haut niveau. Le challenge proposé n'est en effet jamais vraiment à la hauteur si vous prenez le parcours au sérieux. Alors oui, en se baladant, en se plantant, en réparant, vous avez des chances de tomber au classement, mais si vous jouez pépère, sans trop sortir de la route, la première place devrait vous être acquise assez largement. Pire, dans les duels sur circuit fermé, on voit bien le concurrent battre notre temps sans qu'il prenne sa place méritée au tableau des chronos. De quoi se demander si on ne nous prendrait pas un peu pour des buses, parfois. Mais bon, grand public on vous dit.
Côté multijoueur enfin, on trouve un système de salons assez classique, toujours dans la lignée du précédent épisode, avec des épreuves mondiales limitées dans le temps histoire d'affirmer la volonté de l'éditeur de se placer en eSport. Mais le petit plus qui fait plaisir, c'est la possibilité de jouer à deux en local, en écran partagé, chacun contre le fantôme de l'autre. Le genre d'option qui a pratiquement disparu de nos écrans et qui, il faut le dire, fait toujours son petit effet. Dommage tout de même qu'on ne trouve aucune épreuve de type Rally Cross, à l'instar de ce que Sébastien Loeb Rally Evo propose. Ça aurait été l'occasion de profiter à fond de cet écran splitté.
Ce qui fâche et ce qui gâche
WRC 6 a presque tout pour trouver sa place dans votre ludothèque, mais il se plante lamentablement sur un des points essentiels : la technique. Et autant on pouvait comprendre, voire pardonner aux développeurs qui devaient sortir leur jeu en urgence sur deux générations de consoles, autant là il n'y a plus d'excuse. Mais qu'est-ce que c'est que cette image, bourrée de clipping, de popping, d'aliasing, de tearing et de baisses de framerate ? On croirait presque voir la génération précédente à l'oeuvre, celle là même que les développeurs ont annoncée fièrement avoir enfin lâchée pour gagner en qualité sur le moteur 3D. Mais quand une simple comparaison avec Dirt Rally, pourtant loin d'être le mètre étalon en la matière, finit par mettre WRC 6 à terre, on se demande quand même si la glorieuse licence de rallye a bien droit au traitement qu'elle mérite.
Pourtant, tout est affaire de finition, car une fois en course, les yeux rivés sur le prochain virage, on en viendrait presque à oublier ces nombreux petits détails. Les modélisations sont propres, les abords sont bien travaillés et les rares effets de lumière se laissent apprécier. Même les sonorités sont suffisamment convaincantes pour assurer l'ambiance, avec de nombreux bruits extérieurs, très appréciables en surround. Rien d'extraordinaire, bien d'autres jeux se montrant supérieurs, mais rien de rebutant non plus. Sauf qu'à l'heure des Forza Horizon 3 et autres DriveClub, connectés en permanence et offrant une ribambelle d'effets d'un autre niveau, difficile d'avaler la pilule sans avoir les yeux qui pleurent un peu de douleur. Je vous rappelle qu'on est là sur une base de 30 fps (non constant donc) et que la machine n'a jamais qu'un seul véhicule à afficher...