Quelques semaines à peine après la sortie de Rock Band 4, lui-même absent depuis 5 ans, Guitar Hero fête son grand retour avec Guitar Hero Live. Et il le fait dans un registre très différent, plus frais, plus novateur, qui devrait lui faire bonne publicité... mais fait-il pour autant mieux que son meilleur ennemi ?
La bonne nouvelle, si vous voulez mon avis, c'est que pour la première fois de l'histoire de cette rivalité, Harmonix et Activision nous ont livré deux jeux vraiment différents. Deux philosophies bien marquées qui vous aideront très certainement à choisir votre camp plus facilement. Avantages et inconvénients sont tous deux représentés, mais globalement on peut résumer cela à deux notions qui s'opposent : la continuité contre l'innovation.
Tout commence par un constat évident : vous devrez commencer par acheter le jeu en pack avec la guitare, forcément. Les anciennes moutures de l'instrument ne sont en effet pas compatibles pour une bonne et simple raison : la disposition des frettes a changée, et donc le gameplay également. C'est dommage, me direz-vous, mais il faut avouer que cette nouvelle disposition, avec deux rangées de 3 frettes l'une au dessus de l'autre, est vraiment la bienvenue. C'est un petit détail qui change beaucoup la façon d'user de ses petits doigts pour sortir les notes, la rendant plus proche de ce qu'on fait avec une vraie guitare d'une part, et permettant d'autre part un gameplay plus simple, plus intuitif et plus compréhensible une fois en jeu.
Le concert, c'est toi
Guitar Hero Live propose deux modes complètement distincts, qui innovent chacun à leur manière. Celui qui sera très clairement mis en avant et qui créera l'excitation sera forcément le mode "Live". Dans ce dernier, vous enchaînerez les concerts à travers les yeux du guitariste, en vue subjective donc mais aussi en images réelles, sur scène, avec les autres membres du groupe et avec un "vrai" public, constitué de tonnes de gens qui hurlent, juste là, devant vous. La sensation est assez étonnante, d'autant que tout ce petit monde réagira différemment en fonction de votre prestation. Ainsi, si vous enchaînez les fausses notes, les autres musiciens vous regarderont d'un oeil noir, vous demanderont ce qui vous prend, tandis que le public criera au scandale, lançant des "bouuuh" et brandissant des pancartes aux messages désobligeants ! Evidemment, si vous reprenez vos esprits et enchaînez à nouveau les bonnes notes, l'écran se floutera à nouveau pour repasser à la version positive de la vidéo du concert.
Ce mode Live à lui tout seul est assez nouveau pour créer un engouement... tout à fait mérité par ailleurs, même si certaines scènes sont un peu "kitch". Rien qu'à la rédaction, tout le monde c'est massé autour de moi au moment où je lançais mes premières parties, pour voir si ça "marchait" ou non. Et ça marche très bien : on se prend au jeu et, malgré la concentration nécessaire sur les notes, on regarde toujours les filles en furie du premier rang, les inscriptions sur les pancartes plus loin, etc. Bref, on s'amuse à se prendre pour une rock-star.
Le mode Live propose deux festivals différents, pour un total de 13 concerts et de 42 chansons à jouer dans ces conditions. Ces 42 titres constituent ainsi la playlist du jeu, celle que vous pourrez jouer à l'envie autant de fois que vous voudrez et sans avoir à faire de dépenses supplémentaires. C'est un peu léger comme chiffre - Rock Band 4 en compte 65 pour la comparaison - mais toutes les chansons sont bien choisies, dans le sens où elles sont éclectiques tout en proposant pas mal de titres populaires et connus, ou "mainstream" comme vous voulez. Sans parler du fait que s'ajoute à ces titres en libre accès une énorme et évolutive liste de chansons dans l'autre mode principal, le mode "TV"... qui devrait faire parler de lui de manière un peu plus mitigée.
MTV version jouable
Après l'excellente mise en bouche du mode Live, le mode TV représente l'endroit où vous passerez certainement le plus clair de votre temps. C'est ici que se trouve le reste de la musique, que vous gagnerez des niveaux, personnaliserez votre guitare, participerez à des événements spéciaux, etc. Bref, c'est le coeur du réacteur et voici comment ça fonctionne... Deux "chaînes" diffusent en permanence, à toute heure du jour et de la nuit, de la musique. Le programme, affiché à l'avance, vous dévoile par tranches d'une demi-heure ce à quoi vous aurez droit : hard-rock sur la une, hits pop des années 2000 sur la deux, etc. À vous ensuite de prendre l'un de ces flux en cours et d'y jouer chacune des chansons, qui offrent cette fois en fond visuel les clips officiels. En d'autres termes, c'est comme regarder MTV tout en jouant les chansons à la guitare.
Au lancement du jeu, 200 titres supplémentaires tourneront en permanence dans les programmes de ces deux chaînes Guitar Hero TV. Ce qui est intéressant, c'est que cette liste sera sans cesse remise au goût du jour par Activision et Freestyle Games, et d'autres titres viendront donc progressivement grossir les rangs. On "consomme" donc ce mode comme la fameuse chaîne musicale, en écoutant (et en jouant) ce qui nous est proposé, ce qui peut aussi bien saouler (lorsqu'on n'aime pas la chanson - mais on peut alors changer de chaîne) qu'être finalement assez intéressant (lorsqu'on découvre des titres sympas qu'on ne connaissait pas). C'est selon.
Le flux ou la location !
Mais alors, me direz-vous, que se passe-t-il lorsqu'on souhaite jouer le titre de son choix parmi cette impressionnante liste de plus de 200 chansons ? Eh bien c'est là qu'entre en jeu le système économique si spécifique de Guitar Hero Live, et qui devrait à coup sûr diviser les foules. Car si jouer les chansons des deux flux est parfaitement gratuit, il faudra payer chaque accès choisi à la playlist d'un "jeton". Et ces jetons, vous devrez les acheter, que ce soit avec la monnaie in-game (qu'on gagne au fil des chansons et selon le score, ou encore en récompenses quotidiennes exponentielles) ou alors - et là vous me voyez venir à des kilomètres - avec de l'argent réel.
Après une exploration plus qu'étendue de ce mode TV, je vous le dit sincèrement : tout est fait pour que vous mettiez à un moment ou un autre la main à la poche (la vraie, celle avec de vrais sous dedans). Car on a évidemment toujours envie de jouer un titre en particulier, et que les jetons fondent ainsi comme neige au soleil. Il faut jouer 5 ou 6 chansons minimum pour gagner en monnaie in-game l'équivalent d'un jeton, alors autant vous dire que si vous décidez de faire une soirée Guitar Hero entre amis, vos potes auront tôt fait de vous recommander le pass 24h, d'une valeur de 6 euros environ, donnant accès à tout le catalogue pendant une petite journée.
Comprenez bien qu'il s'agit donc là d'un principe de location uniquement, et que contrairement au rival Rock Band 4 donc (c'est là encore une politique à l'opposé), vous ne pourrez pas "acheter" une chanson en DLC pour y accéder librement, autant de fois que vous le voudrez.
S'il est tout à fait possible de s'en tenir au contenu gratuit de Guitar Hero Live, en se contentant du flux proposé et en lançant les chansons de son choix plus "exceptionnellement", ce principe, cette politique de micropaiement, créera à n'en pas douter une véritable frustration chez les joueurs habitués aux jeux musicaux. Ça a été mon cas en tout cas, d'autant qu'on décèle très vite les ficelles d'un système qui souhaite vous alléger régulièrement de quelques euros.
Exemple concret : je suis un fan inconditionnel des Red Hot Chili Peppers, et lors de mon test de Rock Band 4, je n'ai pas résisté à la tentation et ai acheté quasiment tout le catalogue de chansons du groupe qui était proposé dans le store in-game (qui comporte 1700 références). Ça m'a coûté 10 euros et ces morceaux m'appartiennent désormais, j'y joue quand je le souhaite dans tous les modes du jeu, pour le plaisir et pour m'améliorer. Dans Guitar Hero Live, passons rapidement sur le fait que le jeu ne propose pour l'instant qu'un seul morceau des Red Hot (et loin d'être le meilleur/mon préféré), car si je veux jouer le morceau en question, je devrais à chaque fois dépenser un jeton, gagné en jouant d'autres titres plus ou moins à mon goût ou carrément via de l'argent réel. À chaque fois. En location très temporaire.
En définitive, cette politique de micropaiement gâche un peu l'expérience globale en y insufflant de la frustration. C'est malheureux car pour le reste (sans aborder plus longuement les quelques choix étranges de chansons qui s'accordent peu à la guitare), le reste de Guitar Hero Live m'a vraiment beaucoup plu.