Deux ans après le séduisant Zelda : Phantom Hourglass, Link repart à l'aventure sur Nintendo DS. Mais avant de porter sa mythique tunique verte, le lutin va devoir endosser une nouvelle tenue : celle de conducteur de locomotive ! Avec Spirit Tracks, adieu les longues escapades maritimes, place à de généreux voyages ferroviaires. Mais si le moyen de locomotion a changé, il n'en est pas de même du style graphique et de la structure globalement similaires. Alors ce Zelda serait-il un simple épisode 1.5 ? Que les inquiets se rassurent, ils vont découvrir un volet plus vivant et riche que son aîné. En clair, une belle aventure en modèle réduit dans laquelle la pate d'Eiji Aonuma semble s'épanouir. Il était une fois...
L'arrivée d'un nouveau Zelda reste un événement. Véritable concentré d'aventure, d'humour et de gameplay diaboliquement rodé, les épopées du jeune Link n'ont jamais réellement déçu. Il existe pourtant désormais deux grandes familles dans les Zelda. D'un côté les épisodes consoles de salon misant sur des aventures au long cours avec un héros mature... de l'autre, des périples plus condensés, plus insouciants sur DS. Le look même de Link est un indice. Et depuis Phantom Hourglass, sur Nintendo DS, Link fait dans le cartoon à grand renfort d'yeux émerveillés et de quêtes souriantes. Tout naturellement, le style visuel de Wind Waker est donc repris une fois encore. Et même si tout commence par un coup de théâtre, jamais l'aventure ne basculera dans le réel chaos ou la noirceur. En effet, même lorsque le démoniaque ministre Kimado et son sbire Traucmahr viendront kidnapper la princesse Zelda et démanteler la Tour des Esprits... vous ne tremblerez pas. Au contraire, dans cet épisode, les cinématiques se montrent plus conséquentes, bien rythmées et souvent... drôles. Oui, Zelda : Spirit Tracks vous fera sourire et multipliera les clins d'oeil distillés au fil de l'aventure. Du croulant Nico, à la vénérable Tetra, ces attentions sauront toucher les fans de la série, sans perdre les néophytes. On pourra dire ce qu'on veut, dans ce domaine, Nintendo sait y faire.
L'Histoire sans fin
À l'image de Phantom Hourglass, le monde d'Hyrule est de nouveau découpé en quatre grandes zones qui se dévoileront à mesure que vous récupérerez des stèles soigneusement dissimulées dans la gigantesque Tour des Esprits. C'est d'ailleurs en ces murs que tout se jouera. En effet, au sommet de l'édifice a été emprisonné le seigneur démoniaque que tente de ranimer le sombre Kimado. La tour ayant été disloquée en 4 segments, vous aurez compris qu'il existera 4 temples répartis au 4 coins du monde. À chaque temple franchi, la Tour des Esprits se réassemblera. Petit à petit. Heureusement, les passages dans cette tour se révèlent bien moins rébarbatifs que le temple central de Phantom Hourglass. Les énigmes sont en effet plus raffinées et permettent de mettre en scène l'une des principales nouveautés de l'aventure : l'importance de Zelda et un système de coopération inédit.
Zelda : escort-girl de charme
Oui, Zelda n'avait jamais été aussi présente dans un... Zelda. Un épisode en forme d'émancipation ? En quelque sorte. En effet, privé de son enveloppe corporelle lors de son kidnapping, la princesse servira de guide spirituel à Link, à l'image des fées des précédents volets. Elle vous aidera ainsi à prendre possession de Spectres. Dans la Tour des Esprits, Zelda pourra par exemple prendre possession d'armures maléfiques... que vous dirigerez alors au stylet. À vous de faire progresser cet improbable duo en tirant parti des avantages de l'armure (insensible au feu, aux piques acérées, etc). Zelda vous servira aussi de soutien moral dans l'avancée du scénario en vous distillant quelques indices, sans oublier de jouer, par intermittence, le rôle d'adorable boulet. En clair, dans aucun volet de la saga, Zelda ne s'était montrée aussi touchante, humaine et même drôle. Elle contribue en tout cas grandement à la bonne humeur distillée par l'aventure. Rien que pour cela, Zelda peut remercier Aonuma...
Hyrule... deux minutes d'arrêt
Pour ceux qui seraient frileux quant à l'aspect potentiellement dirigiste de la locomotive comparé à la liberté du voilier d'antan, les équipes de Nintendo ont veillé à rendre ces escapades le plus dynamique possible. Ainsi, au fur et à mesure de votre progression, de nouvelles possibilités s'ouvriront à vous comme celle de "tuner" votre train, d'acheminer des passagers, de parer aux attaques impromptues, d'emprunter des téléporteurs pour accélérer vos trajets, sans oublier l'obligation de changer vos plans de route in extremis pour éviter un adversaire... Sans parler de laisser s'échapper la vapeur pour entendre le fameux tchouuuu-tchouuu qui procure un plaisir sans cesse renouvelé (et presque coupable). Du coup, même si dans les premières heures les possibilités sont limitées, la linéarité d'origine s'estompera rapidement. D'ailleurs ces passages en train donnent aussi le ton général d'une aventure qui prend plus l'allure d'un grand voyage bucolique... que d'un compte-à-rebours pour sauver le monde.
Du neuf ? Oui !
Les décors sont vastes, les musiques épiques, et vous pourrez vous concocter des angles de vue sympathiques à l'aide du stylet pour mieux profiter du paysage (grande prairie, zone enneigés, forêt fantomatique, etc). Une légèreté qui n'empêche pas le titre d'offrir une sérieuse profondeur de gameplay. Il existe ainsi quelques nouveaux équipements comme la Flûte de Terre qui vous demandera de souffler sur votre DS et de jouer des thèmes en rythme. On retrouvera aussi l'Hélice des Bourrasques (d'un souffle vous agiterez les vents) et d'autres accessoires inédits dont je vous laisserai la surprise. Autre bon point, même si les donjons sont très ramassés et se bouclent généralement en moins d'une heure, le style général des énigmes a quelque peu évolué. À plusieurs moments, l'influence de Professeur Layton se fait même sentir sur ce Zelda : Spirit Tracks. Certaines énigmes reposant sur de la pure logique liée à des associations d'idées... et non pas juste de la déduction visuelle. Intéressant car elles ont été conçues par un ancien codeur de Nintendo. Un homme à l'esprit mathématique qui offre ainsi certains défis assez inhabituels pour les Zelda. Rafraîchissant.
Le concept des poupées russes
Si l'aventure principale se boucle en une petite dizaine d'heures, le nombre de missions annexes a grandement augmenté comparé à Phantom Hourglass. Pour tout voir, tout savoir, vous allez donc devoir sillonner tous les recoins d'Hyrule. Certaines missions rappellent même les voyages du nain de jardin d'Amélie Poulain, tandis que d'autres plus classiques vous demandent de prendre part à de grands concours de cartes, de participer à des donjons/arènes de la mort, ou d'attraper des lapins pendant vos pérégrinations en locomotive. Il y a clairement de quoi faire dans ce titre à la structure proche des poupées russes. Plus vous progresserez, plus vous découvrirez des possibilités connexes vous invitant à vous perdre dans un monde bien plus vaste qu'imaginé initialement. N'oublions pas non plus l'existence d'un mode multi qui se cantonne malheureusement à des combats en arènes en WiFi local. Le but est ici d'amasser un maximum de gemmes de Force. Sympathique, mais loin d'être incontournable. Plus appréciable cependant, le "Contact Mode" vous permettra d'échanger vos trésors avec des amis. Et des trésors, vous allez en trouver en pagaille.
Finalement, si on regrettera que la réalisation technique n'ait pas été quelque peu boostée depuis Phantom Hourglass, avouons que le style reste imparable. Mignon et coloré, doté d'une prise en main au stylet irréprochable, l'aventure se révèle prenante et souriante. Voici bien un mini Zelda pour son aspect aventure condensée, mais toujours aussi grand par le plaisir qu'il procure. Tada-da-daaaaaaa !!!