En ces temps troubles de Wii Sports Resort à outrance et autres "Tata Paulette, rends-moi la wiimote s'il-te-plait !", il était temps de revenir aux bases, à la pratique du jeu vidéo pour les durs, les vrais, les tatoués. 'Splosion Man m'a explosé.
Derrière cette introduction un brin provocatrice se cache pourtant une réalité commune à la démocratisation des loisirs numériques de ces dernières années, celle d'une approche du jeu vidéo devenue policée à l'excès, où le joueur est souvent pris par la main, voire par le bras tout entier, afin de ne pas l'effrayer avec des éléments inédits de gameplay à intégrer. Spécialité dont la société Ubisoft s'est d'ailleurs fait le chantre, car il ne faudrait pas frustrer le client avec des morts par trop fréquentes ou heurter sa sensibilité d'über-gamer des années 2000 dans la perspective d'un enchaînement de sauts millimétré au cordeau. Et pourtant, dans cet outrageux océan de casual gaming surnage un secteur qui s'en laisse peu compter, celui des "petits" jeux dits indépendants (qui n'ont d'indépendant que le nom puisqu'ils sont souvent édités par des gros studios) qui sont de plus en plus nombreux à voir le jour sur les plateformes de téléchargements respectives des trois gros constructeurs. Leur principal force provient de leur condition, puisqu'ils sont par nature libérés de toute contrainte marketing inhérente aux coûts de production des énormes blockbusters... pour combien de temps encore ?
Oldschool gaming
C'est dans ce contexte que 'Splosion Man, sorte de revival hardcore du jeu de plateformes, vient rappeler à la nouvelle génération qu'il fut un temps où les gamers aimaient à se ruiner les pouces et la santé pour venir à bout d'un titre corsé, dans une sorte de plaisir masochiste où le principal adversaire du joueur restait sa propre capacité d'adaptation face à la difficulté, couplée à une ténacité sans faille. Ce qui n'empêche pas le gameplay de 'Splosion Man de céder parfois à la facilité puisqu'il s'appuie régulièrement sur le principe de l'essai-erreur, et il faudra nécessairement tomber d'abord dans un piège retors (hors coup de moule totalement hasardeux) afin de le surmonter lors du prochain essai... et généralement mieux tomber dans le panneau suivant. S'ensuit alors une véritable course contre la montre jusqu'au prochain checkpoint, car pour ne rien gâcher, des éléments extérieurs, mariant les robots défensifs à la classique eau létale qui submerge rapidement un passage, viennent volontiers jouer les troubles-fêtes pour finir de pourrir le groove du joueur. On ne compte plus le nombre de fois où l'on couine de frustration après un cinquième essai foiré, quand en plus, goguenard, le jeu balance un message légèrement moqueur qui propose de zapper le niveau pour passer au suivant. Oui mais voilà : la jouissance n'en est que plus intense quand enfin, on parvient au terme d'une séquence de sauts hautement gratinée à dompter la bête. Cerise sur la bombe, la durée de vie de 'Splosion Man se montre plus que conséquente puisqu'une fois bouclés les 50 niveaux - parsemés des classiques big boss - du mode solo, on peut s'attaquer au mode coopération et à sa multitude de chapitres au level design personnalisé selon le nombre de participants. À quatre, cela devient d'ailleurs rapidement un gros bordel foutraque et hilarant, le gameplay se payant même le luxe d'intégrer encore des nouveautés ! Une énorme replay-value donc, dont peu de titres peuvent se targuer, sans compter le mode hardcore, qui propose, lui, de refaire l'aventure solo sans les checkpoints, rendant le moindre heurt fatal. En ce qui me concerne, j'ai fait l'impasse, mais j'ai un mot du médecin.
Flying Circus
Ce qui est agréable dans 'Splosion Man, outre son gameplay à l'ancienne, c'est cette capacité qu'ont les développeurs de Twisted Pixel de se moquer d'eux-mêmes (à l'image du générique de fin désopilant) tout en apportant une grosse louche d'humour non-sensique à un personnage principal complètement fêlé. On ne se lassera jamais de le voir déambuler dans les laboratoires en faisant l'avion ou en imitant un gorille, bruits de bouche à l'appui, provoquant les cris et la fuite désespérée de la faune scientifique qui peuple les lieux. En sus, les concepteurs n'hésitent pas à dynamiter de temps en temps leur mise en scène avec de brusques changements d'axe qui arrivent sans prévenir, le jeu passant alors d'une (fausse) vue classique en 2D à une vue 3D qui nous plonge au cœur même de l'action. Mine de rien, ces choix artistiques participent grandement à la bonne humeur générale délivrée par le titre et incitent sans cesse à le relancer pour tenter d'améliorer ses propres chronos de manière à briller dans le classement général afin de se la raconter auprès des collègues. Au détriment bien sûr de sa santé mentale, vous êtes prévenus.
En résumé, 'Splosion Man parvient sans conteste à se hisser sur le podium des téléchargements incontournables du Xbox Live Arcade, tout comme l'était The Maw, précédent titre du studio. Les 800 points nécessaires à son achat deviennent rapidement dérisoires devant la multitude de niveaux à honorer, que l'on soit seul, en couple ou mélangiste. Maintenant, si vous luttez pour boucler le monde 1-1 de Super Mario Bros., réfléchissez bien avant d'investir... On retiendra au final que cet été, les petits n'en finissent plus d'en remontrer aux plus grands !