Avant d'être le titre d'une excellente comédie noire de et avec Danny de Vito, la Guerre des Roses est d'abord et avant tout l'une des guerres civiles les plus décisives dans l'histoire d'Angleterre. Parti d'un bisbi de succession au trône - absolument indémélable sans un doctorat en diagrammes et paperboards - le conflit oppose les Lancaster aux York, deux maisons ayant fait de la rose leur emblème, rouge pour les premiers, blanche pour les seconds. Nous sommes en 1455 et la coutume en matière de différends consiste alors à former son opposant à l'avalage de sabre, généralement sans permission de sa part. Avec ce morceau d'Histoire en toile de fond, les suédois de Fatshark Studios pensent tenir un concept multijoueur clé en main. Attention aux coups d'épée dans l'eau, quand même.
William Wallace et Gromit
Lancaster et York s'affrontent dans un total de sept vastes arènes reprenant les échauffourrées les plus célèbres du conflit. Imaginez 64 hommes d'armes, arbalétriers, archers et cavaliers rejoignant joyeusement la mêlée et se froissant leurs jolis hauberts tous neufs au nom de la souveraineté de leur maison. Au menu des modes de jeu, l'inépuisable Match à Mort en équipe ainsi qu'un mode Conquête dans la filiation Battlefield la plus évidente : capture de différents points de la carte et libération des points contrôlés par l'ennemi. Et. C'est. Tout.
Un peu court, jeune homme, plus encore lorsqu'on réalise que la dominante "close combat" du titre tend à gommer les différences entre les deux modes : la capture d'un point donne très souvent lieu à d'interminables team deathmatchs sur 10 mètres carrés. Interminables, car War of the Roses hérite également des principes d'escouades et de soins chers à la saga de DICE : on respawn sans vergogne sur les petits camarades, même ceux qui se vident de leur sang, on sort les bandages et on y retourne. Autant de fausses bonnes idées qu'on aurait préféré pouvoir désactiver entre joueurs un peu sérieux : elles entretiennent la fièvre ambiante qui semble pousser tout le monde à courir au hasard à la recherche d'une tête à séparer d'un corps.
Ronin des Bois
Pour apprendre à protéger votre cafetière et fendre celle de votre prochain, rien de tel que la mini-campagne didactique concoctée par les développeurs : l'IA passe le plus clair de son temps à buter dans les portes et dans les murs, certes, mais au moins elle se laisse trucider sans trop discuter. Parfait. Vue et contrôles TPS on-ne-peut-plus-classiques, check. C'est dans la gestion des passes d'armes que War of the Roses déroute (souvent) et réjouit (parfois) : clic gauche enfoncé, un léger déplacement de la souris (haut, bas, gauche, droite) déclenche le chargement d'un coup venant de la direction choisie. Plus on charge son coup, plus l'adversaire a le temps de voir venir et de parer en conséquence, dans une manipulation similaire avec le clic droit. Malgré ses imprécisions et son côté fastidieux, ce système permet parfois aux duels de revêtir quelques atours du kendo, avec ses phases d'attaque et de défense. Dommage que toute la subtilité des affrontements vole en éclat dès qu'un troisième larron décide de se joindre à la fête.
Léa Passion Fracture Ouverte
Face à plus d'un adversaire, l'indicateur de menaces pète régulièrement les plombs et les dangers à venir deviennent difficilement lisibles, même pour l'oeil du bretteur aguerri. On pourra toujours tenter les grands moulinets d'arme à deux mains en espérant émincer tout ce beau monde à la chaîne mais c'est souvent nos petits copains de jeu qu'on finit par estropier. Avant de finir à terre, anéanti par la force du nombre ou le poids d'une claymore de cent livres. L'une des rares réussites du titre réside d'ailleurs dans ses animations d'exécutions au sol : le jeu passe en vue subjective et vous force à regarder votre bourreau terminer son office, généralement en plongeant sa lame de manière répétée et extrêmement brutale dans votre carcasse. Ultraviolent, mais ça ne manquera pas de vous faire lâcher un petit rire gras de circonstance. C'est toujours ça de pris.
Tout chafouin, vous déciderez probablement de respirer un peu en vous essayant au combat à distance. Avez-vous la moindre idée du délai de rechargement d'une arbalète d'époque ? Passons pudiquement sur l'utilité d'un arc long lorsque trois hallebardiers vous donnent la chasse : on est en plein Benny Hill. En un mot comme en cent : troquer sa lame, c'est aller au devant d'une mort plus rapide encore. L'arnaque est totale.
The Dandy Warlords
On connaissait déjà l'importance d'en mettre plein la vue chez ces crâneurs de la perfide Albion. Toujours à se la raconter dans leurs complets en tweed qui font se pâmer les jolies paysannes. Bref. War of the Roses pousse le concept quelques crans plus loin et propose un système de personnalisation assez complet. Armes et armures sont définies par leur style mais aussi par le métal qui les constitue et la technique de forge utilisée. Plus que de cosmétique, c'est bien d'impact sur le gameplay dont il est question : alléger son armure, c'est gagner en rapidité de mouvement, en esquive, etc. On a également droit à un éventail de capacités à débloquer et à activer pour créer le spadassin ultime. Dommage qu'à l'heure actuelle, 80% des mêlées consistent en un bête concours de celui qui manie la plus grosse et clique le premier. Enfer et damnation.
Sur le papier, War of the Roses devait proposer des escarmouches à forte dominante technique. Dans les faits, on s'y sent souvent comme dans une réunion de rôlistes bourrés à l'absinthe en pleine forêt de Fontainebleau. Seulement deux modes de jeu et jusqu'à 64 joueurs animés par la même volonté d'enfoncer du crâne, ça fait beaucoup de boxon à canaliser. Une passe d'arme que le jeu de Fatshark Studios ne réussit que très rarement, au hasard d'une partie réunissant quelques amateurs de jolies feintes et de duels structurés. En sus d'un ticket d'entrée financièrement plus que discutable (30€) il vous en coûtera une poignée d'heures d'humiliations gratuites en place publique. Un dernier tribut qu'à titre personnel, je ne paierai pas deux fois : les gifles, pourquoi pas. Mais seulement quand c'est drôle.