L'attente fut longue... Et l'Erreur 37 qui a entaché les premières heures qui ont suivi le lancement de Diablo III était de trop. Preuve que ce troisième volet du hack'n slash de Blizzard qui a posé les bases du genre était incroyablement attendu. Un défi infernal pour Blizzard puisqu'il fallait relancer la série, surprendre sans modifier les codes et s'adresser à tous les types de joueurs. Alors, Diablo III est-il le paradis du hack'n slash ou l'enfer du compromis ?
Avant de commencer à critiquer, débutons en expliquant ce qu'est un hack'n slash. Il s'agit d'un jeu vu de dessus dans lequel vous dézinguez des monstres par milliers en profitant des pouvoirs de votre personnage, choisi parmi plusieurs classes aux multiples spécialités. La carotte qui vous motive à avancer aura pour forme les milliers d'objets servant à équiper votre héros pour en faire un véritable nettoyeur de niveaux à l'architecture aléatoire. Alléchant, non ?
Une ambiance paradisiaque
Passons sur le scénario en résumant ainsi : on retrouve les bases établies de la série Diablo et les fameux démons infernaux commencent leur invasion du Sanctuaire dans la célèbre ville de Tristram, comme il y a vingt ans dans Diablo II. On retrouve donc certains personnages clés dont le nouveau look a peu de chance de déplaire. En effet, Diablo III est en 3D et son rendu est tout simplement phénoménal sans pour autant demander des ressources ultra gourmandes de la part de votre ordinateur. Il faut donc saluer le travail des artistes car le rendu global des niveaux, des monstres, des effets et des personnages est vraiment superbe, sans compter que la variété est au rendez-vous tant au niveau des décors que du bestiaire. C'est splendide et l'ambiance sonore est elle aussi époustouflante. Avec une bonne installation ou au casque, vous sursauterez bien souvent à l'arrivée des monstres ou en déclenchant vos pouvoirs tant la force du son au sens large ajoute à l'univers. Blizzard a donc réalisé un travail d'orfèvre tant en termes de graphismes que concernant les cinématiques, les bruitages ou même les musiques. Le tout est d'ailleurs accessible aux machines les plus modestes sans paraitre désuet. Chapeau bas, même en ce qui concerne les doublages en français, plutôt réussis (la VO reste par ailleurs disponible pour les puristes).
Machines à tuer
Comme toujours depuis les débuts de la saga il est nécessaire de choisir une classe de héros avant de se lancer dans le carnage. Le Barbare, seule classe héritée directement de Diablo II, est désormais entouré du Chasseur de Démons, du Sorcier, du Féticheur, et du Moine. Chacun aura ses avantages. Le Barbare est le roi du corps à corps brutal alors que le Moine joue sur la finesse lors de ses frappes directes. Le Chasseur de Démons utilise des flèches et profite de pièges et autres esquives pour éviter de se faire toucher. Le Sorcier jette, quant à lui, des sorts puissants de dégâts directs alors que le Féticheur invoque des monstres pour contenir ses ennemis et leur lancer des malédictions à distance. Chacun jouit d'un système de ressources (rage, mana, etc.) propre qui influence son gameplay et bénéficie aussi d'un nombre étendu de compétences à débloquer au fur à mesure des niveaux et donc dans un ordre précis. Certaines sont actives (à utiliser via un raccourci) alors que d'autres sont passives et se déclenchent dans certaines conditions. On trouve aussi différentes runes pour spécialiser, là encore, certaines compétences. A tout moment, il est possible de revenir en arrière pour modifier l'ensemble de ses choix. Au final, vous comprendrez que l'on peut réellement spécialiser son avatar en fonction des situations et que deux Barbares ne se joueront pas forcément de la même manière. Si les amateurs des précédents Diablo crieront au scandale et à la simplification (Diablo II proposait des arbres de compétences et la répartition des points de caractéristiques), il paraît évident que ce système a le mérite de faciliter la vie aux débutants sans pour autant manquer de finesse sur la longueur. Un bon compromis, je vous le disais...
WoW syndrom
La gestation de Diablo III a fait débat sur plusieurs points. L'interface d'abord, qui semble très inspirée de celle de World of Warcraft. On dispose ainsi de six pouvoirs dont deux sur les boutons de la souris et quatre sur des touches de raccourcis au clavier. On s'étonne qu'ils soient inamovibles mais une option permet de les réarranger comme bon nous semble, rassurez-vous. De même en ce qui concerne la spécialisation, la tolérance permettant de revenir à tout moment en arrière afin d'essayer de nouvelles combinaisons de runes et de compétences. Spécialisation qui peut choquer les anciens et paraître bien sommaire comparée aux templates de Diablo II. Mais un peu de fraîcheur dans ce monde de brutes épaisses ne fait pas de mal et permet d'expérimenter sans trop risquer, ce qui là encore facilite l'accès aux nouveaux venus.
Dans le même ordre d'idée, la difficulté globale du mode Normal (passage obligatoire avant de profiter des difficultés plus élevées) peut, elle aussi, gêner. En effet, dans ces conditions, les habitués mourront rarement. En fait, il faut bien anticiper l'arrivée des monstres en fonction de votre classe pour soit jouer à distance, soit kitter (les faire courir, leur donner un coup, les faire courir à nouveau et ainsi de suite) ou encore foncer dans le tas. C'est d'ailleurs là que l'on comprend que la synergie d'un groupe repose sur la capacité de chacun des joueurs de profiter des pouvoirs de sa classe afin que le groupe gère au mieux les différents packs de monstres. Le placement a, lui aussi, gagné en importance lorsqu'il faut aller chercher les nouvelles orbes de vie qui pleuvent lorsque vous abattez vos adversaires. La nouvelle gestion des potions de vie, désormais soumise à un cooldown (un temps d'attente avant de pouvoir être utilisé), change pas mal la donne et oblige à les utiliser surtout en cas de réel danger. Diablo III est donc bien différent de ses ainés mais propose une autre manière d'aborder les combats, plus accessible pour les débutants et plus skillée en termes de déplacements et de gestion des capacités pour les habitués. Evidemment les modes Cauchemar, Enfer et Inferno viendront largement corser la donne sur le long terme, vous pouvez en être certains.
Le sacro-saint loot
Alors évidemment, la pierre angulaire de Diablo repose sur les objets avec lesquels on équipe son héros. Ces derniers sont récupérés sur différents monstres et peuvent être revendus ou désenchantés en ville. On utilise alors un portail pour aller dans la cité la plus proche et découvrir les artisans. Le forgeron détruira les objets magiques inutiles pour avoir la matière première nécessaire à la création de nouveaux équipements, dont on obtiendra les patrons en aidant le dit forgeron en lui fournissant de l'or pour agrandir sa boutique. De même, le joaillier permet de sertir certains objets avec des bijoux afin de les spécialiser, d'en créer de nouveaux ou encore de les enlever de votre arsenal pour qu'ils soient utilisables par la suite sur de nouvelles armes plus puissantes. L'interface est claire même si on aurait aimé que le chaudron (vu dans la bêta) évitant les aller-retour constants en ville soit conservé. Sachant que les objets sont légion dans Diablo III, soyez certains que vous passerez souvent voir ces marchands et que vous passerez du temps à créer, peaufiner, revendre, sertir ou transmettre à vos autres personnages ces fameux objets pour gagner en puissance.
Un monde infernal
Diablo III est dans son architecture globale assez proche de ses ainés dans la forme : on tape, on récupère des objets, on tape, etc. Néanmoins, le titre se révèle plus accessible et propose une approche différente, plus basée sur la gestion de l'espace et la complémentarité en groupe (même si elle n'est pas indispensable dans les modes de jeu dits faciles), notamment contre les boss et certains types d'ennemis. Mais le plus grand changement vient finalement de ce passage à la 3D qui offre de nouvelles perspectives en termes d'interactions. On pourra détruire énormément d'objets pour trouver de l'or ou des équipements, faire s'effondrer certains murs afin d'écraser ses poursuivants sous des briques, admirer des vautours tournoyer dans les hauteurs au cours d'un combat pour les voir ensuite piquer du nez afin de vous attaquer dans le dos au moment où vous vous y attendrez le moins, enflammer de l'huile au sol en tapant dans un baril, être surpris par des monstres sautant des balcons en traversant des douves et j'en passe. Avec des décors ultra détaillés, une ambiance sonore phénoménale, des donjons à l'architecture aléatoire, et ces dizaines d'interactions, l'exploration est un régal. Et outre les loots, on a souvent envie de retourner dans tel ou tel lieu pour trouver de nouveaux monstres, participer à des événements aléatoires (des sortes de quêtes annexes), débloquer des hauts faits, etc. D'autant que si l'histoire ne surprend pas, la narration séduit, notamment grâce aux voix off racontant les passages des livres trouvés au détour d'un couloir sans donc interrompre l'action frénétique des combats. Côté durée de vie, comptez entre 15 et 20 heures de jeu pour terminer Diablo III en mode Normal et des centaines pour venir à bout de l'histoire dans les modes de difficulté suivants.
Permanent Internet access
Au cas où vous ne le saviez pas, Diablo III nécessite en permanence une connection internet pour être pratiqué. Une manière pour Blizzard de protéger son jeu, qui pose de réels soucis aux joueurs. En effet, beaucoup considèrent Diablo III comme un jeu solo, et c'est quelque part le cas même s'il est nettement plus savoureux à plusieurs. Quoiqu'il en soit, il est pénible de souffrir de problèmes de connexions (lag, erreur 37, wifi minable, etc.) pour jouer seul dans son coin. Le souci s'est d'ailleurs posé dès le lancement du titre, avec des engorgements prévisibles au moment de l'authentification sur les serveurs et avant de commencer à jouer (en solo ou non), preuve que ce système est vraiment problématique même si la situation a été résolue rapidement. Quoiqu'il en soit, ce DRM déguisé surprend, d'autant que Diablo II avait trouvé un bon compromis entre les jeux ouverts et fermés en 2001 et les joueurs solitaires auront donc du mal à comprendre le choix de Blizzard pour ce troisième opus. On doit sans doute cela à l'arrivée prochaine de l'hôtel des ventes en espèces, permettant de vendre des objets entre joueurs en argent réel (il existe toujours, bien entendu, un hôtel des ventes en argent virtuel déjà actif). Lorsqu'on parle de vraie monnaie, je préfère, et vous aussi sans doute, que la protection soit totale. On apprécie mais difficile de pardonner à Blizzard le fait de devoir se taper des lags et des problèmes de connexion alors que l'on peut bel et bien finir Diablo III tout seul si l'on est un joueur isolé solitaire.
Diablo III est indéniablement un must, voire le champion des hack'n slash modernes. Son passage à la 3D est réussi, son ambiance générale époustouflante et le plaisir de jeu total. Pour autant, certains auront du mal avec les changements dans le gameplay. En voulant rendre le titre plus accessible (template, difficulté, etc.), les développeurs proposent aussi un jeu plus tolérant et moins ouvert qui ne satisfera pas tout le monde et encore moins les acharnés de la saga. Heureusement, on retrouve l'exigence propre à la série grâce aux modes de difficulté les plus ardus et le plaisir de massacrer des ennemis à la pelle, seul ou en groupe, réveillera, à n'en pas douter, votre appétit guerrier.