Testé à partir d'une version import japonaise (voix et textes en anglais). Ceci est une reparution du Test initialement mis en ligne le 22 décembre 2011.

Inutile de tortiller du fondement : Uncharted Golden Abyss reste l'un, sinon le titre incontournable de ce lancement de console. Visuellement détonnant, il servira probablement quelques temps d'étalon technique (aux côtés d'un WipEout 2048). Reste à savoir maintenant si cette nouvelle aventure de Nathan Drake saura passionner les amoureux de la licence autant que les épisodes "canoniques"... Tout en conservant l'essentiel de la formule, cet Uncharted PS Vita se permet quelques nouveautés intéressantes, spécifiques à son support, mais souffre aussi de quelques défauts. Commençons par ce qui peut fâcher.

Un voyage plus classique

L'une des marques de fabrique d'Uncharted, ce sont les voyages dans différentes contrées, souvent inhospitalières, sur la piste d'un mystère emprunt d'Histoire et de mythes. Qui n'a jamais rêvé de ces mondes souterrains, de ces mers lointaines peuplées de légendes, ou d'une richesse soudaine qui se conquerrait au détour d'un stick analogique ? Dans Golden Abyss, on se déplace peut-être beaucoup, mais la variété des environnements reste limitée par rapport aux épisodes de salon. Beaucoup de Jungle et de ruines, un campement / village abandonné, des grottes et des temples... et c'est à peu près tout. Si quelques séquences alternatives (en canoe, ou sur les fesses dans une descente périlleuse de rapides, par exemple), offrent des respirations bienvenues entre les phases d'exploration / grimpette et celles de fusillade, le dépaysement n'est pas aussi souvent renouvelé. En outre, dans cette nouvelle histoire, qui verra Drake partir sur les traces d'une mystérieuse secte du XVIIe siècle, les Sete Cidades (fictive), et d'une des 7 cités secrètes qui seraient, suivant les versions, faites d'or, ou portes du paradis ou de l'enfer, le cadre historique du scénario s'avère bien moins travaillé et tissé dans la réalité que dans les autres épisodes. Le scénario est un peu plus décousu, tout du moins plus difficile à suivre, peut-être, et côté action, le titre paraît plus proche de la recette d'Uncharted Drake's Fortune que d'Among Thieves ou de L'Illusion de Drake, même s'il conserve l'apport de l'infiltration (utilisable par petites touches). Il manque résolument d'une ou deux scènes époustouflantes comme celle de l'hélico du second, ou du décollage de cargo du troisième, mais le côté plus proche de l'original, notamment niveau ambiance de mystère et ruines oubliées au fin fond des forêts tropicales plaira indubitablement aux inconditionnels du premier. Heureusement, la présence des doubleurs originaux (à commencer par Nolan North pour Nathan Drake) assure un liant de qualité, et les nouveaux venus (personnages comme doubleurs), s'insèrent dans ce folklore avec brio.

D(ante)TC

Parmi les nouveaux personnages introduits pour les besoins de cette nouvelle histoire, aux côtés de Drake, on retiendra surtout son vieux copain Dante. Ce vaurien vaguement pleurnichard obnubilé par l'argent campe parfaitement le traître médiocre de l'histoire, révélé dès le prologue : une réussite, qui doit beaucoup aussi à son interprète Jason Spisak. On ne pourra pas en dire autant de Marisa Chase, qui suit les traces de son grand-père et embarque Drake à ses côtés. Avec une personnalité aux reliefs moindres, elle fait plus figure de side-kick un peu mou que de comparse important pour la mythologie du personnage (comme peut l'être Sully par exemple). Néanmoins, en utilisant les techniques et les ressources de Naughty Dog pour créer les cinématiques régulières qui propulsent la narration dans la grande tradition de la série, l'ensemble se laisse vivre avec grand plaisir. Les dialogues savoureux offrent toujours quelques bons mots ici et là, tout en gardant un rythme soutenu parfaitement adapté à l'aventure. La qualité de l'ensemble est peut-être un cran en-deçà de ce qu'a produit Naughty Dog, mais y avoir droit sur une console portable, avec un tel éclat visuel, sur ce magnifique et large écran OLED, c'est tout simplement éblouissant. Car, pour la première fois, peut-être, même sur un "petit" écran par rapport à celui du salon, l'immersion fonctionne, et on retrouve avec ravissement les sensations de jeu des aînés... ce qui m'amène au gameplay, considérablement enrichi par les fonctionnalités de la Vita.

"Touch my rear"

Déjà, avec son second stick analogique (pour moi son plus fort argument) la PS Vita peut fournir la même prise en mains qu'avec une console de salon. Parfaitement adaptée à ce type de jeux, donc, la Vita demandera néanmoins un petit temps d'adaptation, le temps de trouver sa position de confort, afin d'être manipulée sans crispation pour évoluer rapidement et efficacement dans cet Uncharted. Mais ça fonctionne très bien. Par-dessus l'ergonomie classique, on peut choisir d'utiliser différentes choses en sus. L'écran tactile évitera par exemple de marteler le bouton X pour escalader les décors, puisqu'il suffit de tracer du doigt le chemin qu'on veut faire suivre à Drake pour le voir évoluer le long des corniches. Loin d'être gadget également, l'apparition de boutons contextuels sur le côté de l'écran pour ramasser des armes, ou accéder au journal ou encore à l'appareil photo, lancer une grenade rapidement, ou choisir sa trajectoire en laissant le doigt sur l'écran jusqu'à pointer avec précision l'endroit visé. on pourra également toucher directement un ennemi pour le cogner, ou, comble de l'immersion, l'attraper du bord d'une corniche pour le précipiter dans le vide. Efficace. En revanche, les combats au corps à corps se soldent presque toujours par des ralentis "QTE tactiles" dans lequels il faudra balayer l'écran en suivant la direction de flèches apparaissant en surimpression, ce qui peut s'avérer un peu lassant à la longue... surtout quand tout l'affrontement final repose sur cette mécanique (un des points noirs à mon sens de cet épisode), utilisée de manière abusive. Ils sont déjà nettement plus efficaces lorsqu'ils apparaissent pour se rattraper d'un saut hasardeux quand on ne s'y attendait pas.

Autre fonction largement utilisée : le gyroscope. A la manière de la 3DS, on peut ainsi viser en bougeant la console. D'ailleurs, pour les amoureux des contrôles traditionnels, n'oubliez pas de désactiver la visée au gyro dans les options si vous ne voulez pas perturber votre précision au stick analogique, car le gyro est assez sensible. Du coup, pour les snipers, ça fonctionne assez bien - mais, personnellement, je préfère tout de même mon bon vieux stick. Cette détection du mouvement pourra aussi servir dans quelques séquences tout à fait adaptées, en penchant la console vers la gauche ou vers la droite pour diriger Drake, ou, par petites doses et de la même manière, pour le faire sauter entre deux corniches au lieu de pointer le stick dans la direction du saut. Là où il est finalement le plus amusant et le plus justifié, c'est pour prendre les photos. Bien entendu, vous aurez le choix d'utiliser ces possibilités ou non - aucune contrainte, c'est parfait.

Enfin, le panneau tactile arrière servira également, au choix du joueur toujours, pour grimper ou descendre le long d'une corde, ou encore pour pagayer en canoe. Il gère également le degré de zoom de l'appareil photo ou du snipe, avec efficacité. Rien de transcendant non plus, mais c'est utilisé suffisamment intelligemment pour qu'on n'ait pas à lâcher d'autres contrôles (les boutons de façade par exemple), à un moment critique. Le meilleur exemple : la résolution des "mystères", qui rejoignent les trésors à dénicher pour les complétionnistes. Un aspect du jeu qui a été considérablement enrichi par rapport aux Uncharted originaux, et ce n'est pas un mal...

Fusain, parchemin, écran tactile : les indispensables

Il y a un truc un peu ridicule dans les Uncharted : les trésors. En gros, des babioles planquées dans les niveaux, qu'il faut ramasser mais n'apportent pas grand chose. On n'a jamais vraiment reproché ça à la série parce que c'est extraordinairement secondaire, que le principal défonce, et que c'est toujours un petit quelque chose en plus à faire pour les psychorigides de la collection.

Dans Golden Abyss, les trésors existent toujours : mais, via l'écran d'inventaire du journal, ils sont mieux rangés (par thèmes), on voit dans quels chapitres ils sont à tout moment, combien il y en a, etc. Et, en plus, s'ajoutent les "mystères", et les "indices" (des mystères qui servent aussi à résoudre les puzzles du jeu), qui peuvent prendre plusieurs formes et poussent le concept nettement plus loin. Des objets particuliers à trouver, des parchemins à décalquer sur des bas-reliefs (en utilisant l'écran tactile bien entendu), ou encore des artefacts à dépoussiérer à la manière de Tomb Raider Anniversary sur Wii (on les fait pivoter avec le panneau tactile arrière, et on les nettoie avec l'écran tactile), constituent le premier type de "mystères" à dénicher. Certains sont des petits puzzles, chaque dessin décalqué ou morceau trouvé devant être assemblé pour reconstituer une image, et ils approfondissent l'histoire, souvent avec une petite explication audio de ce qu'ils représentent. Le second type de mystère, le plus amusant je trouve, ce sont les photographies. Drake se trimbale à présent avec un appareil, et des images modèles serviront de fil conducteur, de chapitre en chapitre, à ses exercices photographiques : trouvez le bon endroit où se tenir dans un niveau, pour capturer l'image la plus fidèle possible au modèle, et hop ! Un mystère de plus de résolu. Bien entendu, il est possible de se relancer dans un chapitre précédent si on a raté des choses, puis de reprendre le cours de l'aventure ensuite, ou tout simplement de parcourir à nouveau les chapitres après avoir fini le jeu. Mais, ce qui intéressera plus les fans de la licence, c'est la qualité des vrais puzzles : ceux que Drake doit résoudre pour avancer dans l'aventure. Sachez, pour commencer, qu'il ne sont pas plus nombreux que dans les autres épisodes. Ils ne sont pas beaucoup plus compliqués non plus... mais ils utilisent le tactile, bien entendu, afin d'en déplacer les mécanismes. De ce point de vue, donc, rien de particulièrement surprenant non plus : une reprise efficace de la formule originale.

Un peu plus long qu'Uncharted 3 (compter une dizaine d'heures pour boucler les 34 chapitres), mais chiche en contenu additionnel (pas de vidéos bonus ou de multi), Uncharted Golden Abyss, pour un titre de lancement, est excellent. Il apporte son lot de nouveautés bien senties (la gestion des trésors et énigmes, quelques personnages particulièrement réussis), tout en livrant une aventure reprenant assez bien la formule, au moins au niveau gameplay. Ce type de jeu et qui plus est de cette qualité entre les mains, c'est tout de même très séduisant... et pour un "premier jet" de la part de Sony Bend et sur PS Vita, ça n'augure que du meilleur pour la suite !