Les amateurs de ballon rond le savent : depuis que Pro Evolution Soccer a foulé le terrain des consoles HD, l'indétrônable simulation de football de Konami a perdu de sa superbe. Distancé par FIFA depuis la mouture 2008, qui a amorcé avec brio le renouveau de la licence de Electronic Arts, PES promet d'innover chaque année, mais au final, déçoit plus qu'il ne convainc. Un constat jusque-là plutôt morose donc, mais sérieusement ébranlé par les sensations de jeu qu'avait ressenties Julien sur le nouveau PES 2011, lors de l'E3 cet été. Avec une jouabilité totalement repensée, une évolution graphique conséquente, une gestion tactique ainsi qu'une interface générale renouvelées, PES 2011 semble en effet de nouveau prêt à jouer le titre, paré de bonnes intentions mais surtout disposant de sérieux arguments.
Si on s'interroge une seconde sur l'un des charmes de PES depuis que la licence a pris l'envergure qu'on lui connaît, on peut sans hésiter mettre en avant un élément précis : la marge de progression énorme inhérente à chaque nouvel opus. Rappelez-vous, aux grandes heures de la série, passer de PES 4 à PES 5 signifiait vraiment quelque chose et ne consistait pas seulement en une mise à jour des sponsors sur les maillots (quand Konami possédait la licence du club...) ou à réévaluer les statistiques des bonshommes courant après le ballon. Chaque année, il fallait réapprendre à jouer. Réajuster ses comportements de joueur pour coller au mieux aux exigences du titre. Un apprentissage progressif, révélant constamment de nouvelles finesses jubilatoires pour le passionné, qui pouvait dès lors qu'il les découvrait, se flatter de savoir les exploiter... D'emblée, PES 2011 offre cette sensation. Fini les scripts de course lourdingues (ou presque), les passes aveugles qui arrivent on ne sait pas trop à qui et on ne sait pas trop comment, désormais il va falloir poser son jeu et être précis.
Le grand pont
Si à présent la précision semble plus que jamais de rigueur, cela s'explique par l'inclusion d'une petite barre de puissance pour chaque type d'action que votre avatar footballeur virtuel réalise. En effet, si par le passé, cette jauge était réservée au tir, celle-ci est désormais présente pour les passes, les têtes, les reprises et même les touches. Au début, on tâtonne : comme pour tout joueur qui s'est essayé à une frappe au but pour la première fois dans un PES, les frappes passent dix mètres au dessus du cadre, dans le plus pur style d'un Fabrice Pancrate, abattant les avions survolant le Parc des Princes. Enfin, à vrai dire, c'est plutôt les passes qui filent en touche lorsqu'on prend en mains pour la première fois ce PES 2011. Celles-ci, dosées avec trop de puissance, dépassent d'une bonne longueur ce renard de Fernando Torres qui avait su créer le décalage... rageant. Mais une fois que l'on commence à prendre ses marques, le kiff commence et on peut à loisir reproduire le but de El Niño qui permit à l'Espagne de remporter l'Euro 2008 face à l'Allemagne.
Créer des espaces, proposer de nouvelles combinaisons de jeu ; l'ajout de cette barre de puissance permet de donner beaucoup plus de vie au jeu, les multimillionnaires en short se déplaçant désormais avec plus d'aisance et de manière beaucoup moins robotique et prédéfinie sur le terrain. Certes, il manque peut-être la possibilité de faire des appels de balle clairs, et l'inertie des joueurs se fait bien (un peu trop ?) sentir, mais il se dégage une réelle liberté d'action et construire est un plaisir. Tout comme la physique de balle ! Au contraire de FIFA et de ses balles flottantes, gonflées à l'hélium, les réactions du ballon de PES convainquent, tout comme la véritable sensation d'impact qu'offre la frappe dans le cuir, toujours au désavantage de la simulation de EA. Un point noir cependant, relevé dans cette pré-version du jeu, le comportement des gardiens. Prenez par exemple Iker Casillas (meilleur gardien de la Coupe du Monde 2010, champion du monde 2010 et donneur de baisers top classe) : même avec San Iker, sortir votre gardien pour rattraper avec aisance un ballon qui traine dans la surface est une opération des plus risquées. Dans le meilleur des cas, le gardien s'excitera à la vue du ballon et le sortira péniblement des poings, dans le pire des cas, il passera tout simplement à côté comme dans un match de cécifoot. Bref, outre ses menus défauts que l'on espère corrigés dans une version finale, au niveau du gameplay, on prend un reél plaisir à apprendre ces manières de jouer inédites, recelant de situations de jeu nouvelles.
"Robert, c'est pas Zizou..."
Du côté de la réalisation globale du titre, les graphismes tout comme l'interface sont soignés. On ne va pas se mentir, il y a peu de chances pour que vous reconnaissiez l'ailier gauche de l'équipe nationale ukrainienne, qui de toute façon n'a surement pas cette tête là en vrai. Les cadors, à l'instar de Messi, C. Ronaldo ou encore Xavi (champion du monde, étoile sur le maillot, t'inquiètes) sont quant à eux parfaitement reproduits et ressemblants. D'ailleurs, même si le ballon tient un peu mieux sur le pied de La Pulga que sur celui de Brandao, ou que (pour citer un partenaire de foot virtuel) les frappes de CR7 sont "de véritables missiles sol-sol", ces esthètes du ballon n'en sont pas pour autant des monstres de puissance mettant tout le monde à l'amende. Non, comme dans le football moderne, le jeu est rugueux et marquer un gÔAl n'est pas chose si aisée. Cependant, les joueurs les plus talentueux (et les autres aussi, comme Benzema, han) pourront bénéficier d'une pré-sélection de feintes, à choisir lors du plan de jeu, permettant ainsi d'attribuer à chaque point cardinal du stick analogique droit, soit une virgule, soit une roulette, soit une catapulte infernale, etc. Combinez donc une direction du stick, à la gâchette de gauche, pour sortir votre gri-gri préféré.
En parlant de gri-gri, une chose stupéfait immédiatement dès lors qu'on entame une partie : on n'entend pas un vuvuzuela. Bon, c'est peut-être pas si mal me direz-vous mais pour dire vrai l'ambiance des stades n'est pas encore au top et on espère que le tout sera beaucoup plus festif dans la version définitive du jeu. Par contre, même si les menus et l'ambiance générale des interfaces sont encore à mille lieux de FIFA, de son design pimpant et de ses tubes trop classes à la mode, force est de constater que l'interface générale du titre est beaucoup plus agréable et élégante qu'auparavant, plus claire aussi, à l'image des menus d'avant match.
"The Special One" touche
L'autre nouveauté majeure dans cette grande remise à plat qu'est PES 11 se trouve dans l'interface de gestion tactique. Les menus gagnent en simplicité, les formations pouvant même être effectuées avec la bien nommée configuration "une touche". En gros, vous avez le choix de laisser un entraineur virtuel gérer le collectif, selon que vous souhaitez ce dernier offensif, équilibré ou défensif. Très aisée, cette manipulation donne la plupart du temps des résultats avisés. Si vous tenez tout de même à tout décider par vous mêmes, pas d'inquiétude, les réglages manuels sont toujours de la partie et s'effectuent par des actions simples : drag'n'drop pour les changements de joueur, assignation aux touches pour les stratégies de contre, de hors-jeu, attribution de points pour les diverses manières d'évoluer de votre équipe (permutations, pressing, bloc équipe...). Auparavant complexes, les réglages tactiques sont désormais abordables mais gardent leur profondeur. C'était un défi de taille que de toucher à ce genre de paramètres, Konami l'a relevé avec brio.
Pour être tout à fait complet sur PES 2011, sachez que notre pré-version ne nous permettait pas de jouer en ligne. Cependant, nous nous sommes essayés au mode "Deviens une légende" qui vous plonge dans la peau d'un jeune joueur que vous avez créé de toutes pièces. Véritable jeu dans le jeu, ce mode se révèle pour l'instant d'une moins grande intensité que celui du même genre proposé dans FIFA, excellent avec sa réalisation nerveuse. De plus, si on pourra désormais rêver latin avec la Copa Libertadores ("zuper" comme dirait Traz...), la Champion's League semble toujours là pour faire joli, ne proposant que des confrontations d'exhibitions entre grosses cylindrées européennes (Manchester, Barcelone, Madrid, Milan...) avec les équipements qui vont bien et la musique de circonstance.
Disons le de but en blanc : PES 2011 semble en passe de redonner ses lettres de noblesse à la série footbalistique de Konami, les quelques matchs disputés à la rédac' donnant presque toujours lieu à une revanche. Ne croyez pas que ceci est dû à un esprit de compétition exacerbé chez vos rédacteurs : la raison est éminemment imputable au plaisir que l'on ressent de nouveau, en jouant à un PES qui a de l'allure. Revu et corrigé, le nouveau gameplay de PES apporte de nouvelles bases saines à la série, cet épisode soignant le décorum et apportant (enfin !) une réelle profondeur de jeu. Pas encore brutal, ni bestial, PES 2011 redonne tout de même avec panache, un sérieux coup de fouet à la licence. On espère maintenant pouvoir lui dire, en toute simplicité dans sa version finale : te quiero...