Après un premier titre couronné de succès par notre bien-aimé Julo en 2015, le jeune studio Moon remonte sur scène avec une suite directe à Ori and the Blind Forest, qui entend bien peaufiner une formule empruntant autant à l'action progressive d'un metroidvania qu'au genre narratif. Attention, ceci spoile quelque peu...
Ori and the Will of the Wisps situe son action une poignée de semaines après la fin relativement tragique du premier épisode : la chouette Kuro n'est plus, mais la petite bande réunie autour de la créature éponyme s'occupe avec le plus grand soin du seul oisillon que la lumière du Spirit Tree n'a pas consumé. Mais la vie du jeune Ku ne commence malheureusement pas sous les meilleurs auspices, puisque l'orphelin se retrouve dans l'incapacité de voler, la faute à une aile estropiée qui pousse Ori à aller chercher une solution temporaire du côté de sa défunte mère... Les deux compagnons s'envolent ensuite grâce au pouvoir de la plume pour se glisser parmi un groupe d'oies en pleine migration, mais un violent orage met bien vite fin à ce bref moment de plénitude.
Ku comme un ver
Comme tout metroidvania qui se respecte, le vaillant Ori, pourtant stuffé jusqu'à l'os, va perdre tous ses moyens et attributs dans la violente chute qui s'en suit, en plus d'être séparé de son nouveau compagnon de route. Commence alors l'exploration d'une nouvelle région aux paysages aussi naturels qu'oniriques, que le producteur Daniel Smith nous annonce d'emblée comme trois fois plus grande que l'originale :
Puisque le jeu est bien plus ambitieux cette fois, nous avons choisi d'accélérer le rythme, et de proposer un plus large choix de capacités aux joueurs. Mais nous ne pensons pas le jeu comme un "Ori 2", il n'est pas vraiment nécessaire d'avoir joué au premier pour en profiter. Nous nous sentons redevables vis-à-vis de notre public, et c'est sans doute pourquoi il nous a fallu prendre du temps pour travailler cette suite.
Le mantra "le même en mieux" s'avère bien vite palpable, puisqu'Ori and the Will of the Wisps se montre plus rythmé d'entrée de jeu. Nu comme un vert luisant, notre héros situé quelque part entre le chat et l'écureuil va bien vite mettre la patte sur de nombreuses capacités qui vont le rendre plus agile en seulement quelques dizaines de minutes. En plus des classiques double-sauts et autres rebonds sur les projectiles adverses, Ori profite désormais d'un nouveau menu radial qui lui permet d'assigner bien des capacités aux boutons B, X et Y. L'arc lui permet par exemple de toucher des ennemis en plein vol ou d'activer à distance bon nombre de mécanismes, tandis qu'un cocon protecteur permet de régénérer la barre de vie, une béquille toujours bien pratique, surtout lorsque la nature se veut une fois de plus un rien hostile.
"Vous avez le sentiment d'y avoir gagné"
C'est que les différents environnements de Siwen regorgent d'ennemis aux patterns bien établis, et la nouvelle palette d'actions s'avère ô combien salvatrice. Ori and the Will of the Wisps offre en effet bien plus de possibilités que le premier volet, et laisse au joueur le choix d'équiper des badges aux effets variés, qui peuvent aussi faire l'effet d'une épée à double-tranchant, puisque la hausse des dégâts infligés ira souvent de paire avec ceux encaissés. Les plus curieux profiteront de leur exploration pour glaner toujours plus de bonus cumulables, mais il faudra également compter avec de nouvelles quêtes secondaires (dont une en forme d'hommage à Link's Awakening) s'ajoutant sur la world map, qui n'est heureusement plus divisée en zones nébuleuses, mais forme bien un tout organiquement lié.
Il est en revanche extrêmement dommage de ne pas les avoir classées dans un menu dédié : certaines demandent d'accéder à des zones très lointaines, et il n'est pas évident de s'y retrouver, même après quelques petites heures de jeu. Cet ajout témoigne en tout cas de l'envie de proposer une véritable galerie de PNJ, qui de l'ours en mode Ronflex au Rafiki-like apportent de la variété, et offrent de véritables occasions de se poser. Le village central du moulin fera d'ailleurs office de point de repère, et vous offrira une bonne raison de déposer le minerai glané dans des zones plus ou moins cachées. Les activités seront clairement plus diversifiées dans cette suite, puisque nous avons pu essayer pour la première fois les Spirit Trials, une sorte de mini-survival qui vous placera face à quatre vagues d'ennemis, un défi optionnel mais qui mettra assurément votre skill à rude épreuve.
Be kind, rewind
Mais si l'exploration reste en soi un plaisir, grâce à une dimension acrobatique délicieusement affirmée, Ori and the Will of the Wisps pèche bien trop souvent par orgueil en ce qui concerne le pathfinding.
Ceux qui ont retourné l'original ne seront pas spécialement surpris, mais l'aventure s'attend bien trop régulièrement à ce que vous ne fassiez qu'un avec elle pour espérer progresser : à plusieurs reprises, il vous faudra faire preuve d'une sacré dose de clairvoyance, tant et si bien que notre petit groupe de journalistes aura à plusieurs reprises dû appeler les développeurs à l'aide, non sans écarquiller les yeux devant l'opacité de ce qui était alors attendu du joueur.
Entre les éléments du décor qui prennent un malin soin à ne pas s'en détacher ou les mécaniques héritées de The Blind Forest dont il faut miraculeusement se rappeler, il y a vite de quoi tourner en rond, et ce pour un moment... Quel dommage que les différents modes multijoueurs promis de longue date n'étaient pas ici disponibles, ils nous auraient sans doute permis de prendre un peu l'air avant de revenir dans la partie solo avec un oeil plus neuf.
C'est d'autant plus regrettable que l'équipe semble avoir clairement identifié certains défauts du premier titre :
Le principal reproche qui nous a été fait avec The Blind Forest était que le jeu était très difficile. Nous souhaitons donc offrir de nouvelles approches pour tous les types de joueurs. Dès le second chapitre, vous serez bien plus libre d'avancer dans l'aventure à votre rythme, en profitant ou non des quêtes annexes, nous n'avons rien à dicter. Les joueurs pourront changer le niveau de difficulté même en cours de partie, et même mettre fin aux phases d'échappatoire pour revenir en arrière, et poursuivre leur aventure.
Oré Mi Fa Sol
Ces déambulations esseulées auront au moins le mérite de vous permettre de fondre comme une guimauve au coin du feu pour la bande originale absolument renversante de Gareth Coker, qui profite non seulement de thèmes superbement orchestrées, qui laissent dans cette première partie de l'aventure toute leur place aux clarinettes et hautbois, pour un résultat envoûtant à souhait. Et comme si cela ne suffisait pas, les différentes compositions se payent le luxe de transitions si douces et parfaitement amenées que vous n'y prêterez jamais véritablement attention : ce n'est qu'après plusieurs minutes passées dans une nouvelle zone que l'on se rendra véritablement compte de la présence d'une nouvelle composition. Chapeau, maestro.
ON L'ATTEND... MAIS PAS SI RAPIDEMENT ?!
Impossible de le nier : à l'instar de son illustre aîné, Ori and the Will of the Wisps nous a immédiatement happé par son univers aussi envoûtant qu'inquiétant. Il faut dire que les superbes compositions de Coker aident bien. En revanche, le jeu semble encore souffrir de bien sérieux défauts à un petit mois de sa sortie, notamment en ce qui concerne la progression, pas franchement optimale. Espérons que le jeune studio Moon fasse encore relire sa copie avant de la publier, car le jeu gagnerait très clairement à être encore un peu perfectionné...