De prime abord, Spec Ops : The Line apparait comme un TPS classique. Un shooter de plus me suis-je même dit lors de la présentation. Pourtant, l'objectif des développeurs est de tenter une nouvelle expérience dans le domaine : proposer un jeu d'action musclé, certes, mais doublé d'un véritable thriller psychologique.
Les scénarios, la narration et la mise en scène ne sont pas toujours convaincants dans les jeux vidéo. C'est même, à mon sens, le talon d'Achille de notre loisir numérique. Pourtant des réalisateurs de jeux travaillent sans cesse sur ces sujets afin que le média gagne en maturité et en intensité, tout en conservant bien sûr l'essentiel : le plaisir de jouer. Et dans le cas de Spec Ops, il se peut que le résultat soit à la hauteur de nos espérances, comme nous avons pu le constater pendant un peu plus d'une heure de jeu.
Le Apocalypse Now du jeu vidéo ?
Je ne vous conterai pas le début scénario de Spec Ops, nous l'avons déjà évoqué dans nos précédentes impressions (Spec Ops : The Line : on y a joué, nos impressions). Néanmoins, la partie que nous avons pu jouer la semaine dernière fût l'occasion de voir le sergent Walker, le héros, et ses coéquipiers Lugo et Adams, sombrer dans la folie. Ces deux I.A. qui vous accompagnent durant ce périple d'une huitaine d'heures ont d'ailleurs la particularité d'agrémenter la narration. Ils n'hésiteront pas à commenter, voire critiquer, vos choix. Non pas que Walker doivent choisir entre deux phrases types au travers d'une boîte de dialogue à la manière d'un Mass Effet, non. Ici il s'agit plutôt d'agir en abattant, ou pas, un soldat récalcitrant, ou encore en choisissant de la jouer subtil ou d'attaquer de front, etc. Vous l'aurez compris, ces petites réactions de vos camarades ajoutent à la crédibilité de l'univers dans une ville de Dubai submergée par le sable et les tempêtes.
Dubai, terre de la folie
A la base, Walker et ses hommes viennent à Dubai pour une opération de sauvetage après que la ville a été pratiquement ensevelie sous des tempêtes de sable à répétition. Sur place, ils vont découvrir que ce lieu de tous les excès est en proie à une guerre civile meurtrière de grande envergure. Ils y vivront les situations dangereuses et classiques d'un TPS mais à force d'être mis sous pression, et témoins des horreurs de cette guerre, leur physique et leurs réactions évolueront. Pour exemple, vos comparses Lugo et Adams obéiront au quart de tour au début de l'aventure mais deviendront plus agressifs au fur et à mesure que la tension montera. Et certaines réflexions iront même jusqu'à vous remettre en cause, au point de vous demander si vous avez fait le bon choix. Autre exemple : celui que vous incarnez, Walker, donnera un simple coup de poing au sol pour achever un ennemi lors des premières heures de jeu mais finira par s'acharner comme un forcené sur une victime avec la crosse de son fusil si la situation devient trop tendue. Preuve que les actions et les situations affecteront directement le gameplay, ou plutôt sa représentation à l'écran. L'idée est de tisser le narratif dans le gameplay, pour faire vivre une descente aux enfers progressive dans l'horreur de la guerre. Reste à savoir si la "magie" de cette mise en scène progressive, qui a su nous impressionner pour le moment, saura tenir la distance sur la longueur. Et si nous sommes en droit de nous poser la question, soulignons que certaines scènes nous ont déjà laissé une empreinte indélébile, comme celle où (attention, spoiler), après avoir décidé de bombarder une autoroute remplie de soldats, nous la traversons à pieds, aux premières loges pour contempler les conséquences de notre choix...
Narratif Vs. Multi
S'il parait difficile de proposer un multi avec autant d'intensité qu'un solo travaillé à cet effet, il semble encore plus fou de vouloir lancer aujourd'hui sur le marché un shooter sans multi. C'est sans doute ce qui explique la présence d'un mode de jeu en compétitif à plusieurs dans Spec Ops. Ainsi, vous participerez à des joutes à 4 contre 4 au travers d'au moins trois modes de jeu. Souvent, les cartes seront petites, pour obliger les joueurs à jouer en coopération. Dans un des modes par exemple, il faut prendre le contrôle de plusieurs points en même temps. L'équipe est donc séparée, et il faut impérativement se coordonner via micro pour espérer continuer à dominer la carte ensemble et remporter la partie. Si nous n'avons pas encore essayé ces modes par nous-mêmes, les développeurs disent vouloir offrir les meilleurs aspects du solo dans leur multi. On peut ainsi tirer dans les vitres sur lesquelles repose du sable, déposé par les tempêtes, afin d'ensevelir les ennemis, ou encore faire sauter une grenade pour projeter du sable sur les adversaires et les désorienter, comme en solo. Intéressant, non ?
Spec Ops The Line se présente comme un shooter de qualité qui n'oublie pas de faire vivre une expérience narrative différente, voire unique, en tout cas travaillée. Finalement ce qu'il y a de plus difficile dans la guerre, ce n'est peut-être pas tellement les situations de combat, mais la manière dont on vit avec elles ensuite. Et c'est un peu cela que voudrait souligner Spec Ops. Alors s'il doit encore faire ses preuves, surtout en terme de gameplay, cette première heure de jeu nous a convaincu que même s'il ne jouera pas dans la même cour qu'un Gears of War en terme d'action, il devrait bénéficier d'un scénario qui, lui, tiendra la route et pourra nous emmener enfin ailleurs, dans l'enfer de la guerre et de ses conséquences...