Présente-nous ton métier !

Je fais de la hotline dans une société qui fait du jeu vidéo, on s'occupe de régler les problèmes techniques suite à l'achat, installation, utilisation du jeu.
J'ai commencé par passion, après avoir fait en 2005 de la hotline dans une société d'informatique.
Ma journée type commence par se mettre au courant des nouveautés en terme de problèmes, de mises à jour, et d'attendre les coups de fil de clients, qui peuvent aller de 30 appels lors de journées assez calmes, au non stop avec des appels de l'ouverture à la fermeture du support avec des listes d'attente.

Alors, le « Have you tried turning it off and on again? » de The IT Crowd : cliché ou réalité ?

C'est une réalité (rires) : toujours redémarrer son ordinateur. Les ordinateurs ne sont pas stables, mac comme pc, la légende urbaine du mac qui ne plante pas c'est des conneries, même si les pro mac disent que lorsque la roue apparaît « il réfléchit » (rires).
Le plus souvent, en terme technique il s'agit de pilotes pas à jour. En question ensuite on a de tout. « Comment acheter tel personnage », « comment mettre à jour mon jeu »...


Roy, Hotliner dans la série The IT Crowd.

FPS qui se transforment en jeu de couloir, jeu vidéo pour tous âges : ressentez-vous le changement de profil de joueur-type qui vous appelle ? Du hardcore... au casual ?

Concernant la difficulté, je trouve effectivement que ces derniers temps beaucoup de jeux vont en se simplifiant. Ensuite pour les jeux de couloir, type Call of, tu achètes le jeu pour le multi..
On a tous types de joueurs. De l'ado, du jeune ado, de l'adulte, du mec qui joue du travail, des parents et grand-parents... Et certains ne nous appellent que pour des problèmes très pointus.
Au début des appels, on n'avait que des problèmes hardcore. Parce que les gens qui jouaient étaient des gamers, qui savaient changer leur carte vidéo, mettre ses pilotes à jour, donc on mettait du temps à résoudre des « vrais » problèmes. Le public ayant évolué maintenant on a tous types de questions, de l'achat de personnage à des choses plus... insolites.

C'est l'instant « Nadine Morano sors de ce corps » : étant en première ligne, en contact direct avec les sentiments et l'éventuel désespoir de joueurs, avez-vous affaire à des cas de réelle « addiction » ?

J'ai eu un cas. Le mec avait trente ans, il pleurait parce qu'il se faisait camper. Il me disait en pleurant « à chaque fois que je renais je me fais tuer ». J'ai été obligé de lui dire « coupez le jeu et allez prendre l'air ». Parce que pleurer à trente ans parce qu'on se fait camper...
Après on a des parents qui appellent par rapport à ça souvent, pour dire « mon fils de 22 ans il trouve pas de boulot, il reste à la maison » ou alors pour nous demander de bloquer le compte de leur fils. Alors s'il est majeur on n'a pas le droit, mais on se sent obligés de dire aux parents des évidences du type « enlevez les fusibles, supprimez l'ordi ».
Les gens appellent le jeu au lieu de régler les problèmes seuls. Il y a le cas très sérieux d'une gamine qui a appelé un lundi en nous disant « est-ce que mon frère joue ? » donc on lui demande plus d'explications et elle nous dit « il est parti vendredi, il a rejoint un copain du jeu et il devait rentrer dimanche et on a toujours pas de nouvelle. » et je lui demande son âge, si elle sait où il est, avant de lui dire « il a 14 ans, il est absent depuis 2 jours et vous m'appelez moi ? Vous avez pas pensé à aller voir la police ? »... La fille trouvait ça naturel d'appeler la hotline du jeu mais jamais il ne lui était venu à l'esprit de contacter la police. Voilà le genre de cas exceptionnels qu'on a pu avoir.

Avez-vous ressenti un changement avec l'émergence des forums web, qui ont quelque part supplanté (rapidité, accessibilité) la domination des hotlines en cas de problèmes ?

Le côté forum tips on l'a ressenti énormément parce qu'avant les gens appelaient parce qu'ils avaient un problème, et maintenant, les mecs remettent en doute notre analyse du problème parce qu'ils ont lu un message contradictoire sur un forum.
C'est un peu pareil que d'aller voir le site Doctissimo quand tu as mal au ventre, puis de dire à l'annonce du diagnostique du médecin « non, c'est pas ça ! ».
De notre côté on a eu que des hausses d'appels... ensuite cela dépend du produit.
Et puis, même si j'ai tendance à faire partie de ceux qui trouvent que « c'était mieux avant », je dois avouer que quand il n'y avait que la presse dans laquelle tu avais une partie problèmes hardware, attendais ta réponse 3 semaines. Maintenant tu l'attends 3 minutes.

Quand tu fais face à un problème technique sur un jeu qui appelles-tu ? (rires)

(rires) Quand j'ai un problème hardware je le règle tout seul !

Dernière question, tu peux donner ton mail aux lecteurs de Gameblog si un jour ils ont un problème ?

Euh non non (rires) !

Aaaah... C'était mieux avant.
Nostalgie du temps béni où tout ne trouvait pas réponse tout de suite. Du temps où l'on devait attendre, des minutes des heures, ou bien chercher à résoudre son problème sans avoir les yeux à moitié rivés sur le walkthrough. Par extension, ces moments où l'on pouvait passer une journée sans tenir informé d'abord sa mère, puis ses amis, puis de parfaits inconnus de chacun de nos mouvements. Nous sentons-nous comblés maintenant que tout nous est prémâché ? La vie nous a-t-elle été facilitée ? Quand je regarde mon boîtier Free qui ne m'inspire qu'incompréhension et rage les jours de caprices et ma 360 qui, du jour au lendemain sans crier gare s'apprête à m'imposer son RROD turgescent, je ne peux que moi aussi, bien que née en 1988, approuver l'idée que oui, c'était mieux avant.

Salomé Lagresle

Bloggeuse jeux vidéo et gameuse irréversible, Salomé, jeune fille sage de 22 ans, reste néanmoins la femme d'un seul homme : Snake. Collectionnant les jeux Ken le survivant et les pistolets en plastique, cette étudiante en communication et co-présentatrice de l'émission Gameblog sur DirectStar expose, parfois même en chanson, ses humeurs et aventures quotidiennes sur son site coloré : Junkflood.