La rédaction de Gameblog a contacté quelques développeurs, qui reviennent sur l'année écoulée pour partager leurs meilleurs moments de jeu vidéo. Nicolas Doucet est Directeur Créatif chez Sony Computer Entertainment, on lui doit notamment EyePet, paru sur PlayStation 3 en octobre 2009.
Selec' de Dev' : Nicolas Doucet
Les 3 jeux qui m'ont le plus marqué partagent tous une ambiance mature et sont de nouvelles IP basées sur des thèmes classiques : tour à tour chevalier, cowboy, père de famille ou inspecteur, c'est un peu comme un retour aux héros de mon enfance. A coté de ça, Metal Gear Solid Peace Walker m'a conquis et méritait d'être dans ce top mais on en est au 6eme volet, ce qui rend la chose un brin plus facile pour Kojima. Néanmoins, un sacré coup de génie, ce kidnapping au Fulton : ça redonne à MGS une logique dont il avait bien besoin. J'aurai aussi eu la chance de découvrir (très tard) InFAMOUS qui fut ma foi vraiment sympa, un peu le jeu non-officiel de la série « Heroes », sans cheerleader malheureusement. Vanquish a aussi été un incontournable qui m'a scotché et fait beaucoup rire, au contraire de Bayonetta que j'ai trouvé être juste un DMC haute résolution même si son postérieur en cuir et haute résolution m'a quand même fait un peu d'effet... Quand au jeu qui a occupé le plus de mon temps, c'est un petit jeu sympa qui s'appelle Super Street Fighter IV, le rendez-vous du vendredi soir ! RaHaN refuse mes invitations, je vous invite à lui mettre la pression sur le forum ! Bon, voilà pour les bons jeux, place maintenant aux joyaux de la couronne 2010. Salut à tous et bonnes fêtes !
Les 3 jeux qui ont marqué mon année :
Pour tous ceux qui aiment à dire que le jeu vidéo est devenu trop grand public, trop facile, trop scripté, bref que c'était mieux avant, c'est l'heure de baisser le calbute (ou de faire exploser le sous-tif) et de tout mettre sur le capot parce que Demon's Souls, c'est l'antithèse parfaite du jeu moderne.
Attention, je ne parle pas d'un jeu injouable, injuste ou compliqué qui donne envie de balancer la manette mais d'un jeu qui pousse à la réflexion à chaque instant, à l'observation, à l'établissement de stratégies et qui sait récompenser, pourvu qu'on lui donne sa chance. Parce que soyons clairs, pour apprécier cette perle, il faut quand même être un peu maso et se faire violence pendant au moins les 5 premières heures (le jeu est très très dur de prime abord et au fond du château, personne ne vous entendra crier...). On se sent seul, perdu, on a les chocottes et même pas droit à un bouton de pause ; Demon's Souls, c'est le jeu qui teste le sang-froid par excellence. Mais au final, la roue tourne et l'on se retrouve petit à petit le maitre des lieux, celui qui fait régner la loi, même si on laissera échapper toujours un caca mou à l'arrivée d'un nouveau boss ou lors de l'invasion d'un autre joueur humain qui vient pour vous trucider. Demon's Souls sait nous agripper, il devient omnibulant, une vraie drogue.
Je le résumerai en un savant mélange de Resident Evil et Vagrant Story, deux jeux PS1 qui m'avaient marqué. Le mode en ligne est une idée géniale qui permet de se sentir accompagné(e) dans sa quête le temps de quelques minutes sans jamais altérer ce coté sombre et solitaire qui le définit. Au bout, il y a la satisfaction, ce sentiment d'avoir déjoué des pièges mortels et de s'être transcendé. C'est un voyage personnel au cœur de sa propre confiance et de sa dextérité. Et je n'avais pas eu ce sentiment depuis belle lurette. Si vous aimez les jeux à challenge, vous vous devez de jouer à Demon's Souls.
Le monde entier en a déjà parlé alors je vais essayer d'apporter une touche personnelle. Pour moi, Heavy Rain rentre dans ce top parce qu'il représente une étape clef dans l'histoire du jeu vidéo. Un palier a enfin été franchi, un Saint Graal trouvé : Heavy Rain est le premier jeu qui peut se targuer d'être un film totalement interactif. Ça faisait plus de 20 ans qu'ont nous disait que ça viendrait : il y avait bien eu Another World, Fahrenheit, mais ceux-ci restaient soit un peu rigides, soit inégaux.
Là, ça y est, on peut le dire, le film interactif devient une réalité : bien écrit, entrainant, intelligent, sensible, mature mais jamais trash, parfaitement construit autour d'un scenario béton qui nous m'a fait vibrer du début à la fin. Je me suis totalement pris dans l'intrigue d'Ethan Mars et je rejoins l'opinion de Julo sur l'effet « père de famille » qui accentue ce drame. Moi-même, je ne cessais de penser à ma vie privée en y jouant, tellement la situation était amenée de façon crédible et les choix à faire pesants de conséquences. Pour beaucoup de raisons, Heavy Rain me laissera toujours un souvenir indélébile. Me retrouver le matin avant le boulot devant mon café, la tête prise entre les deux mains à me demander quelle décision prendre le soir venu, passer la journée au travail à cogiter, à me remettre en question par rapport à ce choix fatidique et éventuellement l'exécuter le soir après en avoir discuté avec ma femme, le doute au ventre... Tout cela représente des émotions auxquelles je n'avais jamais été confrontées et surtout pas dans un jeu vidéo - sauf peut être dans Dragon's Lair évidemment... :).
Heavy Rain peut être partagé avec une audience ; il est donc social, même s'il requiert une rapidité d'exécution de la part du joueur. Sur un fond de polard très bien ficelé, il se hisse facilement au rang de super série ou très bon film. Franchement, je ne peux que tirer ma révérence à ses créateurs qui ont eu le courage d'y croire jusqu'au bout dans ces temps où la créativité a l'air d'avoir du mal à trouver preneur (*cough* Castlevania !). C'est en observant Heavy Rain que je garde l'espoir que beaucoup reste à venir et que, sûrement, d'autres Saint-Graals restent à découvrir. Essayer de le finir une seconde fois enlève beaucoup à la magie de l'expérience originale. Heavy Rain doit être joué une fois, accepté tel quel et c'est là qu'il prend toute sa saveur, comme un bon thriller. Tout simplement.
Si on m'avait dit « Hé ! Et si on faisait un jeu de cowboys super chouette ? », J'aurais bien rigolé... et pourtant ! Je ne suis pas fan de GTA. Bien que j'admire le génie du game design, les histories de gangsters, les casquettes XL et les ratiches en or, c'est vraiment pas pour moi. Par contre j'aime bien les spaghettis et les westerns. Red Dead, c'est donc ma délivrance. Alors évidemment la formule est connue, mais créer un monde aussi solitaire et crédible à la fois, chapeau (Stetson) les gars ! Je pourrais chevaucher des heures, admirant cette vie que les développeurs sont parvenus à insuffler, c'est tout simplement envoûtant.
Au contraire des jeux ultra scriptés qui caractérisent cette génération, on a droit à une bonne histoire ET un monde ouvert ou virtuellement tout ce qui nous passe par la tête est possible : mettre des claques à une fille de joie et démarrer une baston dans un saloon, courir à l'étage, siffler son cheval, tomber dessus et se barrer vite fait en entendant fuser les balles : le pied total ! John Marston apparait comme un nouvel anti-héros qui nous colle à la peau et on se prend totalement au jeux d'acteur des autres protagonistes. On sent la sensibilité dans le produit final, malgré un nombre inimaginable de bugs. Le mode en ligne ne cesse de croître avec chaque mise à jour et se retrouver à chevaucher au crépuscule sous l'harmonica avec ses potes, s'arrêter chez MacFarlane et taper un poker, voilà un superbe exemple de rassemblement social au cœur d'un jeu video. Red Dead prouve que si on y met du cœur, n'importe quel theme classique peut trouver sa forme en un jeu video. Allez hue coco !!
J'ai aimé aussi : Metal Gear Solid Peace Walker, Vanquish, Super Street Fighter IV, Super Mario Galaxy 2, Lara Croft and the Guardian of Light, Pac-Man Championship Edition DX, Alan Wake, Wii Party.
Ma déception : Castlevania Lords of Shadow
Castlevania et moi, c'est une longue histoire d'amour. Je suis un fan de la série depuis que j'ai douze ou treize ans, mon premier jeu acheté sur NES et depuis pratiquement toutes les versions, de la PC Engine à la DS en passant par les collectors PS2. Même quand le jeu est mauvais il y a toujours quelque chose à gratter avec Vania : une bande-son prenante, des illustrations superbes d'Ayami Kojima... Mais depuis un moment, en dehors des versions portables, la série partait en vrille et avait besoin d'un renouveau. Jusque là, pas de problème et Konami a vu juste en essayant de rectifier le tir. Malheureusement, après avoir fini le jeu, je ne peux que regretter cette opportunité manquée. Techniquement, on appréciera l'ensemble mais jamais je n'avais vu un jeu repomper autant au centimètre carré, à tel point que chaque niveau a cet arrière-goût de « déjà joué », ça en devient presque une blague de mauvais goût.
Je le trouve aussi bien trop long et souvent rébarbatif, clairement un jeu annulé puis recyclé qui n'a plus grand-chose à voir avec ma série adorée : ça sent le manque de confiance d'être unique de la part d'une équipe qui, de toute évidence, possède de hautes capacités techniques mais a eu peur... Sans cette flamme créative, le jeu ne prend jamais vraiment son envol et fait figure de « me too ». Pourtant il y avait matière. On notera un sursis cependant : l'arrivée dans le château des vampires au milieu du jeu qui m'a donné espoir avant que l'aventure ne reparte dans la redite... Pas un mauvais jeu, mais un titre qui emprunte beaucoup trop pour être crédible et se hisser au rang des grandes séries, et avec de si bons jeux d'action en offre (je pense a Vanquish qui en comparaison brille de caractère), je peine à trouver les raisons de recommander Lords of Shadow et pour la première fois de ma vie, voici un Castlevania revendu tellement ma déception fut forte. Qui aime bien châtie bien : Vania, tu pars au cachot et sans applicateur !